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Feliciano Lopez : « Rafa sait que Toni fait un travail extraordinaire »

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En bouclant le prochain numéro de GrandChelem spécial « Tous coachs ? « , nous avons remis la main sur trois inter­views faites par notre jour­na­liste, Krystel Roche, pour le numéro précé­dent et jamais publiées dans leur inté­gra­lité. Rafael Nadal par Feliciano Lopez, Grigor Dimitrov et Gilles Simon. On commence par le premier dans la liste. 

Feliciano, avec Rafa, vous vous taquinez souvent sur le court ?

Oui, toujours… Je le taquine, lui aussi. On se connaît depuis telle­ment long­temps, on blague en perma­nence. On se connaît par cœur, et l’on est tout le temps comme ça. En général, l’ambiance entre les joueurs espa­gnols est excel­lente. Rafa est très drôle, son oncle aussi. Ils essayent toujours de faire des blagues avec tout le monde. Surtout avec moi !

Tu n’es pas trop suscep­tible ?

Non, non !!! Pas de problème (sourire). Car c’est toujours dans un bon esprit, pour rire. Ce n’est jamais méchant. Je comprends ses blagues, il comprend les miennes ; on ne se « braque » jamais.


Aujourd’hui, il est plus diffi­cile de se moquer de lui…

Maintenant, je ne peux plus me moquer de son jeu ! (rires) C’est le meilleur joueur du monde, donc… Je ne peux que me taire ! Mais ce qui est certain, c’est que quand on se moque l’un de l’autre, c’est toujours fait dans un bon esprit. Quand je lui ai dit qu’il devait améliorer son jeu, ou son service ou quoi, je le disais vrai­ment pour le taquiner. Quand on joue ensemble, on plai­sante systé­ma­ti­que­ment, on se charie toujours sur nos jeux respectifs.

Qu’est-ce qui t’impressionne chez lui ?

Forcément, il impres­sionne tout le monde par son jeu. Quand je l’ai vu pour la première fois, très fran­che­ment, jamais je n’aurais pensé qu’il atten­drait ce niveau, qu’il serait aussi bon. Il a tout donné pour progresser d’année en année, et, comme tu peux le voir, chaque saison, Rafa hausse son niveau d’un cran. La première fois que je l’ai vu, c’était à Barcelone, il devait avoir 12 ou 13 ans, et jouait un tournoi – de 14 ans. J’ai regardé son match pendant cinq minutes : ça m’a suffit pour être impres­sionné par sa façon de se battre. Il était très agressif sur le court, malgré son jeune âge. La deuxième fois, c’était à Séville, pour un Challenger. On s’entraînait ensemble, et j’avais vrai­ment été bluffé par sa façon de s’entraîner, sa façon de se comporter sur le court. Il voulait toujours gagner le point ! Après seule­ment deux ou trois coups, il essayait de faire un point gagnant… J’étais vrai­ment surpris de voir avec quelle auto­rité il tentait ça (sourire).

Pensais‐tu qu’il serait un jour n°1 mondial ?

Je savais qu’il serait un très, très bon joueur. Je n’avais aucun doute quant au fait qu’il soit top 10. Chaque année il progresse, et chaque année il m’impressionne davan­tage. Je pense que c’est vrai­ment ça, la clé de son jeu : il s’améliore de saison en saison. Si tu compares son jeu en 2005, lorsqu’il a remporté Roland‐Garros pour la première fois, et son jeu actuel… pfffiou… C’est un joueur tota­le­ment diffé­rent. Et il n’a que 22 ans !… 

Pour toi, Rafa va‐t‐il conti­nuer à progresser ?

Oui. Bien sûr. Il a encore telle­ment d’années devant lui, il a une marge de progres­sion énorme. Et Rafa est inti­me­ment convaincu qu’il doit progresser. Chaque saison est plus diffi­cile, la pres­sion est chaque année plus forte. Maintenant qu’il est n°1 mondial, tout le monde veut le battre. Donc cela ne fait abso­lu­ment aucun doute : il veut vrai­ment conti­nuer à améliorer son jeu. 

Son éduca­tion est‐il l’un des secrets de sa réussite ?

Oui ! Dès qu’il a débuté le tennis, il a su qu’il devait rester très humble, et travailler très dur pour rester au top. Je pense que c’est ce qu’il a fait. Ça l’a beau­coup aidé, c’est certain.

S’entraîne-t-il plus que les autres ?

Il est proba­ble­ment l’un des joueurs qui s’entraîne le plus. Après, sur le court, peu importe qu’il soit en match ou à l’entraînement, il est concentré de la même manière, joue avec la même intensité.

Le fait d’habiter sur une île est‐il impor­tant ?

Je ne pense pas que le fait d’être un insu­laire soit l’un des secrets de sa réus­site. Chacun a son chez‐soi. Bien sûr, Rafa a toujours été très soutenu par ses proches, sa famille, ses amis. Mais… Comme tous les joueurs, après tout. Rafa est un mec qui aime beau­coup retourner chez lui dès qu’il en a l’occasion, après les tour­nois. Il est profon­dé­ment attaché à son pays, son île. Il aime pêcher, faire tout un tas de choses là‐bas. Evidemment, retourner à Majorque régu­liè­re­ment l’aide. Mais comme cela aide tous les joueurs de retourner chez eux entre deux tour­nois. Ni plus ni moins.

Quelle est la place de son oncle Toni ?

A mon avis, Toni est tout simple­ment la personne idéale pour Rafa. Il s’occupe de lui depuis toujours, et son influence est très impor­tante, indé­niable. Depuis qu’il est tout petit, Rafa partage ses jour­nées avec lui. Ils ont partagé telle­ment de choses. Le compor­te­ment de Rafa sur le court, son état d’esprit, sa façon d’être toujours positif : c’est en partie le résultat du travail de Toni. C’est son oncle, et il n’est jamais évident de travailler avec un membre de votre famille. Mais je pense qu’ils ont une super rela­tion, et Rafa est conscient que Toni réalise un travail extra­or­di­naire pour lui. Son oncle est quelqu’un de très impor­tant dans sa carrière.

Le fait d’être gaucher est‐il un avan­tage ?

Non, je ne pense pas que ce soit un avan­tage. Nous ne sommes pas nombreux sur le circuit (peut‐être sept ou huit gauchers seule­ment dans le top 100), la majo­rité des joueurs sont droi­tiers. Cela explique peut‐être qu’il soit plus compliqué pour eux de jouer contre nous : tout simple­ment parce qu’ils ne sont pas habi­tués. C’est juste une ques­tion d’habitude, rien de plus. 

Que penses‐tu de sa riva­lité avec Federer ?

La riva­lité qui existe entre Rafa et Roger est une très bonne chose pour un sport comme le tennis. Mais je pense que Rafa aurait progressé, même sans Roger. Cela fait partie de son état d’esprit : cher­cher à progresser, encore et toujours. Quel que soit l’adversaire.

Propos recueillis par Krystel Roche

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