Pour son numéro 22, GrandChelem/welovetennis a décidé de faire la lumière sur le circuit secondaire. Entretiens…
A la rencontre d’un circuit bien particulier ; Stéphane Apostolou ; Claire Feuerstein ; Gianni Mina ; Arnaud Clément.
A suivre : Eric Prodon, Stéphane Robert, Jarkko Nieminen, Frederico Gil.
Arnaud Clément est un témoin de choix pour nous parler du circuit secondaire. L’Aixois a connu les honneurs du circuit principal – finale de Grand Chelem, top 10… – et ses dessous, le circuit Challenger notamment, suite à des blessures et, depuis, quelques semaines, une sérieuse baisse de performance (il est 127ème à l’ATP).
Tu as choisi de disputer l’Open de Guadeloupe, plutôt que de t’inscrire aux qualifications d’Indian Wells. Pourquoi ?
Les qualifications d’Indian Wells ne m’enchantaient pas trop, ce tournoi étant vraiment long. D’autant qu’il y a des heures de décalage horaire en plus. Je préférais venir ici (NDLR : l’entretien a été réalisé en Guadeloupe), c’est un endroit sympa et, avec mon classement actuel, c’est intéressant de jouer un 100 000 . Après, je voulais arriver au top, mais ça ne s’est pas très bien déroulé (NDLR : il a perdu au premier tour)…
La première fois que tu as dû repasser par la case Challengers, après avoir disputé des ATP 250, tu l’as vécu comment ?
(Il réfléchit) Ca dépend. Ca dépend des Challengers. Le circuit Challenger est en‐dessous du circuit principal, mais ce n’est pas aussi notable que dans d’autres sports, comme le golf. Tu peux varier, jouer des Challengers, jouer des Grands Prix, des Challengers, des Grands Prix… L’année dernière, j’avais surtout joué des Grands Prix, mais j’avais aussi inclus quelques Challengers dans mon programme. On peut sauter d’un circuit à l’autre. Après, ça dépend d’où tu les joues, tes Challengers. Moi, aujourd’hui, j’aurais du mal à aller jouer des Challengers paumés, au Kazakhstan ou en Ouzbékistan. Le lieu, c’est important. Je joue en majorité en France, parce qu’on a la chance d’avoir des tournois bien organisés. Ce n’est pas toujours le cas à l’étranger…
En début de carrière, on est peut‐être moins regardant ?
C’est vrai. Mais, de toute façon, je n’ai pas tant joué de Challengers. J’ai eu la chance de grimper assez rapidement au classement.
Tu n’es donc pas resté très longtemps sur le circuit secondaire ?
Et bien non. En fait, j’ai fait quelques Challengers, mais, aussi, rapidement, des qualifications de Grands Prix. Comme je me qualifiais assez régulièrement au début, je n’ai pas eu à rester bien longtemps sur ce circuit. Ma première année chez les pros était un peu galère quand même. On n’arrive pas dans les 100 en ne jouant que deux ou trois tournois… Mais, j’ai progressé de manière constante et mon classement a toujours évolué dans le bon sens. Après, c’était un vrai investissement pour mes parents qui m’ont tout financé la première année. Jusqu’à ce que je rentre dans mes frais.
Quand est‐ce qu’on rentre dans ses frais, justement ?
Un peu avant de rentrer dans les 100. Au début, quand on se lance, on joue des petits tournois, on progresse doucement et ce n’est pas évident. Moi, je ne sais pas si j’aurais pu jouer au tennis sans l’aide de mes parents. J’ai eu la chance d’avoir des parents qui, sans être très riches, ont fait ce sacrifice. C’est encore plus dur pour ceux qui n’ont pas cette possibilité.
Tu as le souvenir d’un tournoi aux conditions vraiment difficiles ?
Oui, je m’en rappelle d’un, en Roumanie. Pourtant, je ne suis pas difficile. Moi, aller dans un hôtel Formule 1 ou dans un 4 étoiles, je m’en fous. Ma seule exigence, c’est que ça soit propre. Là, j’étais à Brasov… Ce n’était franchement pas terrible ! Il n’y avait pas d’eau, la seule boisson qu’on pouvait acheter, c’était du coca. Délicat… Bon, et puis la salle de bains n’était pas propre non plus. Je ne te fais pas un dessin ! Je n’y suis jamais retourné… (Rires)
Il y a de grosses différences entre un Challenger et un Grand Prix, dans l’organisation, la réception des joueurs ?
De temps en temps, mais ce n’est pas systématique. Il y a même des Challengers qui sont mieux organisés que certains Grands Prix. Après, en règle générale, les Grands Prix ont de meilleures infrastructures et sont un peu plus complets, mais ce n’est pas automatique. Il y a des Challengers extrêmement bien rôdés, qui tournent très bien, où tout est top pour les joueurs. Or, ce n’est pas le cas dans tous les Grands Prix.
C’est parfois difficile de choisir entre un bon Challenger et les qualifications d’un Grand Prix ?
Parfois, oui. Même si, aujourd’hui, j’aurais du mal à ne faire que des Challengers. Ca ne me dérange pas de descendre de catégorie de temps en temps, de me faire un programme mixant des Challengers et des Grands Prix. Mais je ne perds pas mes objectifs de vue : si je joue un Challenger, c’est pour gagner des points et essayer de remonter au classement. Actuellement, je suis dans cette situation.
Aujourd’hui, si tu avais à choisir entre un titre en Challenger et une victoire sur un top 30…
Ca dépend ! Si c’est en Grand Chelem, je préfère battre un top 30. Après, je n’ai gagné qu’un titre en Challenger dans ma carrière – il y a deux ans, à Cherbourg. C’était vraiment sympa. Tu arrives au bout d’un tournoi, tu es le seul qui reste… Même si ce sont des épreuves de catégories inférieures, les gagner te donne toujours un super feeling.
Ca semble plus difficile, chez les filles, d’évoluer sur le circuit secondaire. Tu sens des différences avec les hommes, sur le plan financier, mais aussi en termes d’ambiance ?
Déjà, le circuit secondaire féminin, ce n’est pas le même que le nôtre. Chez les hommes, tout est mieux ! Les tournois sont mieux organisés, il y a plus d’argent… L’ambiance est aussi beaucoup plus agréable. Donc, oui, rester longtemps entre deux eaux sur le circuit féminin, c’est dur. En plus, nous, on est beaucoup de Français et on s’entend globalement très, très bien. Ici, en Guadeloupe, on se retrouve à plusieurs, on passe du temps ensemble, c’est sympa. Chez les filles, c’est différent, il y a beaucoup moins de chaleur. Maintenant, il ne faut pas croire non plus que personne ne se parle…
Publié le mercredi 6 avril 2011 à 19:00