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Federer‐Murray, je t’aime moi non plus

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Le monde du tennis en parle. Le match entre Roger Federer et Andy Murray est l’affiche attendue, tant par l’opposition de style que par la rela­tion, parfois tendue, qui lie les deux joueurs, qui n’hésitent pas à commencer le match en confé­rence de presse.

Si Murray a reçu quelques piques, il a su toujours s’en servir pour rebondir. La première épine avait été lancée par Federer après sa défaite au premier tour du tournoi de Dubaï en 2008 6–7(6), 6–3, 6–4. « Il va devoir bosser très dur pour les prochaines années s’il continue à jouer de cette manière. Il reste derrière. Il doit courir énor­mé­ment et il attend très souvent que son adver­saire fasse l’er­reur. Je lui ai donné les points, j’ai fait des fautes, mais après 15 ans de carrière, vous devez gagner un point plus souvent plutôt que d’attendre que l’autre vous le donne. »

Dans les mois qui ont suivi, l’Ecossais est devenu un joueur d’une autre dimen­sion, gagnant un huitième de finale dantesque contre Gasquet à Wimbledon, rempor­tant le Masters 1000 de Cincinnati, jusqu’à arriver en finale de l’US Open, en battant Nadal en demie, et échouant contre Federer. Les mots du Suisse pendant l’hiver ont eu l’effet d’un certain élec­tro­choc raconte la mère d’Andy, Judy Murray. « Andy a proba­ble­ment réalisé qu’il devait être plus agressif s’il voulait prétendre aux grands titres. »

Malgré cette évolu­tion, Federer reste l’attaquant naturel, quand Murray se plaît à faire déjouer l’adversaire, usant de sa science du tennis. Le numéro 1 mondial pense néan­moins mener les débats. « Quand nous jouons bien tous les deux, ce sont des matchs serrés, mais j’ai toujours le senti­ment que c’est l’attaquant qui détient la clé du succès. Alors, c’est moi qui tient les rênes que je gagne ou que je perde, pas lui. »


« C’est comme à l’époque de Sampras et d’Agassi »
, aime comparer le Suisse. « Agassi était agressif, mais Sampras gardait la direc­tion des opéra­tions parce qu’il servait bien, il repous­sait les limites, il prenait des risques. Murray ne le fait pas souvent, mais ça ne lui enlève rien. C’est juste son style de jeu. » Justement, son tennis et sa person­na­lité ne séduisent pas au‐delà du public de l’O2 Arena. Murray demeure assez impo­pu­laire en dehors de la Grande Bretagne. Pourtant d’autres joueurs font preuve d’ambition, d’autres joueurs sont réservés, d’autres joueurs ont du carac­tère. Mais avec l’Écossais cela ne passe pas. 

Le manque de spec­tacle ? Peut‐être. Parce que la plus belle arme de Murray est proba­ble­ment autre qu’un simple coup de tennis, elle serait plutôt son intel­li­gence de jeu, sa connais­sance du tennis et de lui‐même. « Je ne passe pas beau­coup de temps sur le court, mais plus dans la salle de gym, pour affûter ma condi­tion physique. C’est ce que je dois travailler. Au niveau de la frappe de balle, j’ai toujours été à l’aise. Ça vient natu­rel­le­ment pour moi, plus que pour d’autres. » Son début de match contre Del Potro, où en vingt minutes il a passé en revue tout le réper­toire du tennis, en défense comme en attaque, a été bluf­fant. À se demander combien de cerveaux a le garçon. 

« Quand vous avez battu des gars à plusieurs reprises, vous ne voulez pas qu’ils sachent comment vous aller les jouer. Vous devez trouver d’autres solu­tions, faire des choses auxquelles ils ne s’attendent pas, apporter d’autres facettes à votre jeu. Quelque soit votre adver­saire, il y a toujours des aspects dans leur jeu que vous pouvez exploiter, parce que vous faites certaines choses mieux qu’eux. » Alors, à l’instinct, Federer va atta­quer, et Murray va manœu­vrer. Une oppo­si­tion de style et de carac­tère comme le tennis en aime. Si Nadal a fait beau­coup de bien au tennis en venant trou­bler le long fleuve tran­quille de Federer, Murray est arrivé en bous­cu­lant à sa manière la hiérar­chie du tennis mondial, avec la confiance des grands.

De votre envoyé spécial à Londres