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Federer : « C’est le futur qui montrera si Nadal est plus fort sur dur et gazon »

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Le numéro un mondial est resté digne, comme il sait le faire, même s’il évident qu’a­près cette raclée, la tension va être très forte à Wimbledon. Le Suisse s’est même permis de sortir un peu de ses gongs, désa­busé, mais toujours avec un calme très helvé­tique. Extraits d’une confé­rence de presse qui fera date, c’est en effet assez rare que Roger prenne un 6–0 lors d’une finale du tournoi du Grand Chelem.

Roger, désolé, je pense que, lorsque tu es venu sur le court, tu n’en­vi­sa­geais pas ce scénario ?
Non, pas du tout. J’attendais un meilleur résultat, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Rafa a très bien joué, il m’a mené la vie dure. Il a été meilleur que moi, c’est tout. C’est une défaite cuisante. J’ai essayé, mais cela n’a pas suffi.

S’est‐il amélioré depuis un an ?
Je pense qu’il a fait un tournoi remar­quable. Il a dominé tout le monde. Au cours des deux dernières semaines, il n’a pas eu d’ad­ver­saires à la hauteur. Il s’est amélioré. Il joue main­te­nant diffé­rem­ment depuis notre demi‐finale en 2005. Il a un meilleur jeu de défense et d’at­taque. Quand il joue son jeu, il peut dicter le jeu de la ligne du fond du court. C’est dur pour l’ad­ver­saire, c’est clair.

3/3 au deuxième set, tu as une balle de break pour mener 43. Et puis, NADAL fait une amortie. Tu essaies de la rattraper. Ensuite, tu as fait un revers, qui a malheu­reu­se­ment touché le filet. Puis, il a remporté le jeu, qui était un jeu clef…
Oui, c’était un jeu clef. J’ai raté ce revers. Je l’ai mis dans le filet. Que peut‐on faire ? On ne peut rien faire. C’était ma meilleure chance. Je ne sais pas si j’au­rais pu renverser la vapeur en rempor­tant ce point. J’étais très loin de lui aujourd’hui. C’est déce­vant. Au cours des dernières semaines et des derniers mois, j’avais le senti­ment de bien jouer. Nous sommes très heureux des efforts que j’avais faits depuis le début de l’année. Malheureusement, j’ai perdu. C’est une défaite cuisante, comme je l’ai dit, mais c’est la vie. Bien sûr, je vais essayer l’année prochaine et me reprendre.

Roger, tu as commis environ 50 fautes directes. Pourquoi cela ? Etais‐tu surcon­centré ? As‐tu commis des fautes non provo­quées parce que la balle de Rafael rebondit très haut ? Pourquoi tant de fautes directes ?
Peu importe ce qui s’est passé. Maintenant, le match est terminé. La saison sur terre battue est achevée. Il est diffi­cile de trouver des réponses à ces ques­tions, d’ana­lyser le match main­te­nant. J’aurais souhaité un résultat diffé­rent, bien sûr. J’aurais préféré mieux commencer, comme au cours des dernières années, mais Rafael a régné en maître sur le court aujourd’hui.

Quelle est la raison clef ?
Quoi, la raison clef ?

Quelle est la raison clef de cette défaite ? Quelle va être la signi­fi­ca­tion pour l’avenir de ce qui s’est passé aujourd’hui ?
Bien évidem­ment, le point impor­tant est le match de Rafael. Il n’a pas fait de fautes directes. Lorsqu’il attaque, il est abso­lu­ment incroyable. En matière de défense, il a des coups incroyables. Je ne peux que le féli­citer pour le niveau de jeu qu’il a produit aujourd’hui et au cours de ces deux dernières semaines. Il gère très bien la pres­sion. On a l’im­pres­sion que c’est très facile pour lui. Pour parvenir à une telle perfor­mance sous pres­sion, cela montre quel cham­pion il est. Pour moi, c’est un bon tournoi dans l’en­semble. Je pars de ce tournoi avec un état d’es­prit positif. Je ne me dis pas : « Oh, mon Dieu, je n’avais pas de chance aujourd’hui. » J’ai eu une chance au deuxième set. Peu importe. J’attends avec impa­tience la saison sur gazon et la deuxième partie de la saison. J’espère qu’elle sera meilleure que la première partie de la saison.

Cette défaite met‐elle à mal ta convic­tion selon laquelle tu pour­rais remporter ce tournoi ?
Après une défaite de ce type, on n’a pas envie de jouer contre Rafael le lende­main ! J’espère être là l’année prochaine. Rafael sera là égale­ment. Ce n’est pas facile, mais je pense que j’avais le bon état d’es­prit. Je travaille d’arrache‐pied. Je vais essayer d’avoir une saison régu­lière, sans avoir des ratés comme cela a été le cas en début d’année. J’espère être encore meilleur l’année prochaine que cette année. J’ai l’im­pres­sion que je m’amé­liore. On verra ce qui se passera l’année prochaine.

Tu risques de le jouer peut‐être dans quatre semaines. Penses‐tu que tu auras un avan­tage psycho­lo­gique à Wimbledon dans quatre semaines ?
Je l’ai déjà battu en finale, Rafael, je lui ai déjà infligé un 60, je l’ai déjà battu très faci­le­ment, lors de matches précé­dents. Sur terre battue, il me donne du fil à retordre. Depuis 5 ou 6 ans, je n’ai pas perdu à Wimbledon sur gazon. Sur le gazon, je suis le grand favori. La terre battue et le gazon sont des surfaces très diffé­rentes. Si je devais perdre à Wimbledon, les faits seraient différents.

Tu es de loin le deuxième joueur sur terre battue. Es‐tu soulagé de voir la fin de la saison sur terre battue ?
Sur terre battue, les 3 ou 4 premières semaines sont diffi­ciles. On ne s’amuse pas beau­coup. Tout le monde parle de Paris. Lorsqu’il y a les inter­na­tio­naux de France, on se calme, on se concentre sur son jeu. En fait, on fait des confé­rences de presse tous les deux jours. Je me sens main­te­nant plus soulagé.

On dit que tu es un joueur extra­or­di­naire. Penses‐tu que Rafa est un joueur extra­or­di­naire sur terre battue ?
Oui, c’est sûr. Je n’ar­rête pas de le féli­citer. Il est excellent sur terre battue.

Penses‐tu avoir la capa­cité de remporter le tournoi ?
Le tournoi était bon pour moi. Je pars de ce tournoi en étant positif. J’ai essayé de faire tout ce que j’ai pu. Je me suis mis en posi­tion pour gagner. Rafael était meilleur aujourd’hui. J’essaie de rester positif, même si je ne m’im­pose pas dans ce tournoi. Parfois, on perd. La victoire fait davan­tage plaisir. Sur terre battue, c’est diffi­cile pour moi. Je suis resté fort dans mon esprit. J’essaie de me mettre dans la posi­tion idéale pour battre Rafael. J’aurais pu perdre en demi‐finale, cela n’a pas été le cas. J’ai été fort, solide. J’ai pu me frayer un chemin en finale. Cela me donne beau­coup de satis­fac­tion. J’espère que je pourrai mieux jouer la prochaine fois contre Rafael. On peut espérer qu’il joue moins bien. Aujourd’hui, c’était dur de jouer contre lui. Pour n’im­porte quel adver­saire, cela aurait été dur face à Rafael. Mais il faut être positif. Vous n’avez pas forcé­ment besoin de victoire pour avoir un état d’es­prit positif.

Vas‐tu conti­nuer à travailler avec Higueras ?
Oui, au début de Roland Garros, nous en avons parlé avec Jose. Il va venir à Halle avec moi. Il sera à mes côtés à Wimbledon. On va s’en­tre­tenir pour les prochaines semaines. On va voir comment cela se passera pour le reste de l’année. Il sera vrai­sem­bla­ble­ment avec moi.

Les capa­cités et les compé­tences de Rafael sont en pleine amélio­ra­tion. Penses‐tu qu’une meilleure défense l’emporte sur une meilleure attaque ?
Je ne sais pas si c’est une ques­tion de défense ou d’at­taque. C’est tout simple­ment sa façon de se déplacer sur la terre battue. Il est incroyable. Il est très mobile. Il y a 3 ans, il jouait en coup droit, il avait des appuis ouverts en coup droit. Je ne peux pas faire cela. Il a un très grand avan­tage en la matière. Il peut déco­cher des coups droits de la ligne du fond du court. Il a grandi sur la terre battue. Il a un meilleur avan­tage que moi. C’est un gaucher. Son coup droit est incroyable. Mentalement, il est très fort. Il ne rate pas beau­coup. Lorsqu’il passe à l’of­fen­sive, il joue très près de la ligne. C’est un joueur de terre battue abso­lu­ment excellent.

Quels sont les compar­ti­ments du jeu dans lesquels Rafael a été meilleur que toi ? Quels sont les compar­ti­ments du jeu dans lesquels tu n’as pas excellé ?
C’est une défaite sévère. Lorsque l’un d’entre nous joue très bien, il est très diffi­cile de l’ar­rêter. Bien sûr, je suis désolé pour les spec­ta­teurs, j’au­rais préféré livrer une meilleure pres­ta­tion. Mais aujourd’hui, il était très, très bon. Je n’ai rien d’autre à ajouter.

Aujourd’hui, le public était de votre côté.
Oui, sur les points que j’ai gagnés. Il n’y en avait pas trop, donc c’était diffi­cile. J’aurais vrai­ment espéré faire mieux aujourd’hui, parce que je pensais que le public pour­rait être un facteur dans ce match, s’il deve­nait serré, comme au deuxième set. Je n’ar­ri­vais pas à être assez près dans le score pour que les spec­ta­teurs aient une réelle chance de rentrer dans la partie. C’est ma faute. C’est dur.

Quand as‐tu réalisé que c’était un excellent Nadal qui était en face de toi ?
Il a certai­ne­ment bien commencé. Je ne pense pas avoir mal servi, ce n’était pas mal. Il a encore progressé en retour. J’avais vrai­ment de la peine à prendre l’avan­tage avec mon service, plus que d’ha­bi­tude. Cela m’a coûté le match. Je peux gagner mes jeux de service, j’ai toujours une chance sur les jeux de retour. Quand il breake sans arrêt, c’est telle­ment diffi­cile de jouer contre lui. J’étais mené deux sets à zéro, 40, ce n’est pas très drôle.

Est‐il plus dur de perdre sur un tel score que contre Hewitt, où tu menais deux sets à zéro. On oublie, parce que l’on a en face un mec qui réussit tout ?
Sur le coup, c’est presque plus facile de perdre comme cela. Tu sens que tu ne vas pas gagner. Les choses se mettent de plus en plus de son côté. C’est la même chose pour lui. C’est plus dur quand tu perds à l’ar­rache. A la fin, perdu c’est perdu !

Pensez‐vous que Nadal, chaque fois, est plus loin de vous sur terre et plus près dans le gazon à Wimbledon ?
Le gazon se joue une fois par an. Sur terre battue, on s’af­fronte plus souvent. Sur dur, on n’a pas eu énor­mé­ment de matches. Je vois comment il progresse. J’ai l’im­pres­sion que je m’amé­liore encore. Mais, cette année, il fallait que je fasse plus de travail pour revenir à mon niveau, après avoir eu un début diffi­cile, avec la maladie. J’ai perdu un peu d’en­traî­ne­ment. Il y a deux ou trois ans, il a été blessé. Il a eu le même senti­ment. J’ai eu la même chose. Quand tu reviens, tu dois faire plus d’ef­forts pour revenir à niveau. J’ai pu le faire. J’ai eu une grande satis­fac­tion à arriver à ce niveau‐là. Bien sûr, la défaite est dure aujourd’hui. Rafael progresse sur terre battue. C’est le futur qui montrera s’il est plus fort sur dur et gazon. Cela dépendra des résultats.

Peut‐on battre Nadal à Roland Garros ? Cela devient‐il possible ? On a le senti­ment que c’est de plus en plus dur pour tout le monde.
Oui, c’est diffi­cile, mais il faut y croire. C’est ce que j’ai fait aujourd’hui. J’ai essayé de jouer ce que je voulais faire. Quand il joue comme il a joué aujourd’hui, cela rend les choses compli­quées, diffi­ciles. Il a des sensa­tions incroyables à Roland Garros. Il n’a jamais perdu. Lorsqu’il était battable, il était blessé. Plusieurs joueurs devraient penser à le battre. Pas assez y pensent.

On est en 2009, un petit génie vient vous voir et vous dit : « Cette année, vous n’allez gagner qu’un tournoi. Vous pouvez choisir entre Wimbledon et Roland Garros. » Quel tournoi choisissez‐vous ?
Je ne réponds plus à ces ques­tions. Elles sont trop « cons ».

Pourquoi pas Roland Garros ?
Parce que je veux tout gagner. Je n’ai pas de préférence.

Tu as parlé de ta maladie, de tous les efforts que tu as dû faire pour revenir. Depuis le début du tournoi, tu nous as dit que tu te sentais à 100 % de tes possi­bi­lités physiques. Ne nous aurais‐tu pas un peu menti sur ce point ? Te sens‐tu vrai­ment physi­que­ment au même niveau que tu as pu être avant ta maladie ?
Honnêtement, oui. Je me suis bien senti, aujourd’hui, physi­que­ment. Malheureusement, les points se sont déroulés d’une façon plus compli­quée pour moi que d’ha­bi­tude. Il ne joue plus si court, comme il le faisait dans le passé. On ne peut plus atta­quer son coup droit comme on pouvait le faire avant. Il retourne encore mieux que dans le passé. Tu ajoutes tout cela, cela devient plus diffi­cile. J’essaie vrai­ment d’aller dans le combat avec lui, physi­que­ment. Je n’ai pas eu un problème aujourd’hui, mais les points sont durs. Pour lui aussi, pas seule­ment pour moi. Il a pris le dessus, j’ai essayé de ne pas lâcher, mais il était plus fort que moi aujourd’hui. Ce n’était pas physique ou mental, il était juste plus fort que moi aujourd’hui. C’était le Rafael le plus fort que j’ai jamais vu.

Roger, vous êtes toujours numéro 1. C’est très bien comme cela.
Je suis content que vous le disiez pour moi !

Ressentez‐vous la concur­rence des jeunes, déjà cette année ?
Oui et non. Certains qui avaient mon âge étaient plus forts que moi, Safin, Hewitt, Andre Agassi, Sampras. Après, c’étaient Roddick et Ferrero. Rafael est arrivé. Maintenant, il y a Djokovic. Il progresse. J’aime bien, cela me motive. C’est un chal­lenge. Je suis confiant dans le fait que la seconde moitié de saison sera meilleure que la première. Je vais jouer sur le gazon. On verra ce qui se passera sur le clas­se­ment. Rafael joue très bien, mais la saison de terre battue est finie. Cette inter­view a été recopié du site offi­ciel de Roland Garros https://www.rolandgarros.com/