Guy Forget, capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis a annoncé la composition de la séléction qui ira défier les Pays‐Bas dans quelques jours. L’ancien numéro 4 mondial a donné à cette occasion une longue interview.
Guy, quels joueurs avez‐vous retenus pour affronter les Pays‐Bas ?
J’ai retenu Jo‐Wilfried Tsonga, Gilles Simon, Gaël Monfils et Michaël Llodra. Et j’ai proposé à Jérémy Chardy de venir comme cinquième joueur.
Jérémy Chardy fait sa première apparition dans le groupe France. C’est une juste récompense au vu de ses récents résultats…
Je n’aime pas parler de récompense. On ne sélectionne pas un garçon pour le récompenser. Je prends un cinquième joueur parce que je peux avoir besoin de lui. Mais effectivement, à mes yeux, c’est une sélection complètement méritée.
La blessure récurrente de Gilles Simon au genou, qui l’a contraint à l’abandon face à Ferrero à l’US Open, laisse encore planer un doute quant à sa participation à la rencontre. En cas de forfait de Gilles, avez‐vous déjà une solution de rechange ?
Justement, j’ai fait appel à un cinquième joueur parce que je sais que ce genre de chose arrive malheureusement fréquemment, un peu trop souvent à mon goût, d’ailleurs. Il faut toujours prévoir un autre joueur en cas de blessure. Maintenant, on a la chance d’avoir en France un bon réservoir de joueurs, au niveau assez homogène.
On peut imaginer voir Gaël Monfils effectuer ses grands débuts en Coupe Davis à l’occasion de cette rencontre…
Oui, c’est fort probable. Depuis maintenant deux ans, Gaël est en progrès constants. Et sur terre battue, c’est le joueur français qui a obtenu, cette année encore, les meilleurs résultats.
Avez‐vous envisagé, un moment donné, intégrer Richard Gasquet à l’équipe, sans pour autant l’aligner mais pour accélérer son processus de retour ?
On l’a vu par moments contre Nadal, au premier tour de l’US Open, Richard a toujours un potentiel incroyable. Mais aujourd’hui, il faut lui donner du temps pour se reconstruire. On sait qu’il a été très perturbé par tout ce qui lui est arrivé. Il est en train de se reconstruire tennistiquement, physiquement aussi. Il n’est pas encore revenu à son vrai niveau. Cela ira de mieux en mieux au fil des semaines. Et en imaginant que la prochaine décision de l’ITF soit clémente pour Richard, il sera vraiment à 100 % de ses capacités en compétition probablement en toute fin d’année, voire la saison prochaine. Maintenant, ce qui est important pour lui, c’est de prendre son temps, de ne pas se précipiter. Avant d’imaginer le revoir jouer en Coupe Davis ou avoir des résultats extraordinaires sur le circuit, il faut lui laisser du temps.
Que pensez‐vous du parcours de vos joueurs à l’US Open, sachant que deux d’entre eux, Jo‐Wilfried Tsonga et Gaël Monfils, sont encore en course au stade des huitièmes de finale ?
Je les ai trouvés très bien. Ils ont désormais, pour certains d’entre eux, un nouveau statut à assumer en tant que têtes de série. Dans ces conditions, il faut assurer, éviter d’avoir des matches trop difficiles en début de tournoi, savoir imposer son style de jeu. Je les ai trouvés convaincants dans ce registre. Les autres, comme Julien Benneteau, ont également plutôt bien
joué.
Une nouvelle équipe de double va forcément voir le jour à Maastricht. Vous avez demandé à vos joueurs de s’associer dans les tournois préparatoires… Avez‐vous déjà une idée de l’équipe que vous allez aligner ?
Avec l’absence de Richard (Gasquet), j’ai demandé à Jo (Tsonga) et à Mika (Llodra) de jouer ensemble. Ils ont disputé plusieurs matches côte à côte, en pratiquant un tennis de qualité. Aujourd’hui, c’est peut‐être eux qui ont le plus de chances de jouer ensemble face aux Pays‐ Bas. Mais il faut aussi penser à d’autres équipes. Les autres doivent également pratiquer le double le plus régulièrement possible pour, le cas échéant, pouvoir jouer avec l’un de leurs copains, et ramener un point à l’équipe de France. Cela se prépare tout au long de l’année sur les tournois, bien avant les rencontres de Coupe Davis.
Que pensez‐vous de l’équipe néerlandaise ? Sur le papier, c’était sans doute le tirage le plus abordable ?
Aujourd’hui, je dirais que je n’ai pas envie de me soucier de l’équipe néerlandaise. Même si les Pays‐Bas ont un jeune joueur qui vient de gagner trois tournois challengers d’affilée et qui évolue actuellement en pleine confiance (NDLR : Thiemo De Bakker). C’est un joueur dont il faudra se méfier. Il a du talent et sera peut‐être un jour parmi les vingt premiers mondiaux. C’est un garçon qui a, apparemment, un gros potentiel. Maintenant, si on fait une bonne préparation, que l’on est capable de retrouver notre niveau de jeu sur terre battue, je pense que l’on doit gagner et imposer notre style de jeu, quels que soient les adversaires en face. On a la chance d’avoir en France des garçons qui pratiquent un tennis relativement offensif et qui
se comportent en patron. Face à cette équipe néerlandaise, il faudra justement se comporter en patron sur le terrain et faire sentir aux joueurs adverses que l’on évolue à un niveau largement au‐dessus.
De l’extérieur, une défaite serait incompréhensible… Aborde‐t‐on avec davantage de pression une rencontre que l’on n’a pas le droit de perdre ?
Quand les Français affrontent en Grand Chelem, ou tout au long de l’année sur le circuit, des joueurs moins bien classés qu’eux, ils sont déjà dans ce type de situation. On attend de leur part une victoire. Nous concernant, la défaite n’est pas envisageable. Pour autant, c’est un match qu’il faut prendre très au sérieux, bien préparer pour éviter toute mauvaise surprise ou se faire peur. On sait bien qu’en sport, il y a sans arrêt des résultats étonnants. En Coupe Davis plus qu’ailleurs, on n’est jamais à l’abri d’une surprise. Mais là, il faudra que les Néerlandais en réussissent trois pour nous battre. On est largement favoris sur le papier, et on va là‐bas pour gagner tous les points les uns après les autres.
Vos joueurs majeurs sont toujours en lice à l’US Open. C’est idéal pour la confiance, mais pour l’adaptation à la terre battue, cela risque d’être un peu court…
Je pense qu’il vaut mieux être encore en course dans un tournoi du Grand Chelem, même si ce n’est pas la même surface, pour le capital confiance, quitte à disposer de moins de temps pour s’adapter à la terre battue, que l’inverse. C’est‐à‐dire disposer de joueurs moins forts, mais qui se préparent depuis plus longtemps sur terre. Quand on prend une première balle à 215
km/h, quelle que soit la surface, c’est une balle qui vient vite ! Quand on a une balle de break à négocier, ce n’est pas forcément le coup de raquette qui fait la différence, mais plutôt la capacité à jouer ces points‐là, avec conviction, et sur la durée. Que ce soit Gaël (Monfils) ou Jo (Tsonga), ce sont deux garçons physiquement très au point. Ils bougent bien. Ils sont sereins en match. Et même s’il leur manque deux ou trois jours de préparation sur terre, ce sera largement compensé par le capital confiance acquis à New York. Et tout cas, je le souhaite…
Est‐ce que cette expérience de barrages peut être fondatrice, comme cela avait été le cas lors de la campagne 2000, qui avait été suivie par une victoire en 2001 ?
Pour Gaël, par exemple, c’est le type de match parfait pour débuter en équipe de France. Lors du premier tour face aux Tchèques, certains présentaient la France comme l’équipe qui allait gagner la Coupe Davis dès cette année, alors que certains joueurs, Gilles (Simon) notamment, n’avaient jamais joué en Coupe Davis de leur vie. C’était un match difficile. Ce n’est pas
simple d’affronter les Tchèques, à l’extérieur, alors qu’on ne possède aucune expérience dans cette épreuve. Berdych ou Stepanek n’évoluaient pas au même niveau que les Néerlandais. Quelque part, un match comme celui‐là contre les Pays‐Bas est très intéressant. Jouer à l’extérieur, c’est un peu plus compliqué, mais jouer contre une équipe abordable, cela permet de faire ses armes, petit à petit. Si Gaël est amené à jouer, c’est le scénario idéal pour entrer en équipe de France. Même chose pour Jérémy Chardy. On ne sait pas ce qui va se passer. Mais il vaut mieux commencer comme ça, plutôt que de débuter en finale de la Coupe Davis, alors que l’on n’a jamais joué un match dans cette épreuve auparavant.
Allez‐vous effectuer un stage avant votre départ pour les Pays‐Bas ?
Effectivement, on va se retrouver samedi matin à Paris, pour jouer deux jours sur terre battue, avant de partir pour les Pays‐Bas en fin de journée, dimanche.
Publié le lundi 7 septembre 2009 à 20:12