Comme pour de nombreux observateurs, Guy Forget ne trouve pas les adjectifs pour qualifier la 12e victoire de Rafael Nadal à Roland‐Garros. Le directeur du Grand Chelem parisien estime que l’Espagnol pourrait encore ajouter quelques lignes à son palmarès et pourquoi pas dépasser le record de Roger Federer.
Guy, que dire sur cette nouvelle victoire de Rafael Nadal…
Je suis bouche bée et abasourdi devant cette nouvelle performance de Rafael Nadal en finale face à un très bon Dominic Thiem qui l’a poussé dans ses retranchements. Il y avait une telle intensité au début du match que je me demandais qui allait craquer en premier. Alors qu’il était breaké dans le premier set, il a trouvé les ressources pour faire baisser son adversaire. Ce qui est bluffant, c’est cette capacité à tenir cette exigence du très haut niveau avec cette même rage de vaincre sur tous les points depuis 14 ou 15 ans. On dit d’un joueur vainqueur d’un Grand Chelem qu’il est hors‐norme, lorsqu’il en gagne quatre ou cinq, c’est une légende. Alors quand il gagne 12 fois le même… Je n’arrive pas à trouver les adjectifs pour ce qu’il vient de faire.
Rafael Nadal double le record de Borg (six) que l’on pensait imbattable… Jusqu’où peut‐il aller ?
S’il est épargné par les blessures, un aspect à prendre en compte au‐delà des 30 ans, il sera encore le favori pour l’année prochaine. Dominic Thiem ou Novak Djokovic peuvent le faire trébucher. Maintenant, il a une telle maîtrise de cette surface, à être capable de jouer le bon coup au bon moment, à glisser en coupant les trajectoires. Quand on le voit évoluer à ce niveau, c’est absolument prodigieux. Alors je ne vais pas dire 15 titres, mais pourquoi pas 13 déjà.
Peut‐on le voir avec le record de victoires en Grand Chelem ?
Oui, c’est possible. Il est à deux longueurs de Roger Federer et on peut penser que s’il n’avait pas eu ses pépins aux genoux, il serait déjà à 20 lui aussi. On a la chance d’avoir, à la même époque, deux champions galactiques comme Roger Federer et Rafael Nadal. Je crois qu’il faut se réjouir de les avoir et ne pas attendre trop vite la nouvelle génération car le jour où ils seront partis, ils risquent bien de nous manquer l’un et l’autre…
« Ce qui est bluffant, c’est cette capacité à tenir cette exigence du très haut niveau avec cette même rage de vaincre sur tous les points depuis 14 ou 15 ans. »
Dominic Thiem est‐il le jeune joueur le plus capable de concurrencer voire de battre Rafael Nadal ?
Il vient de faire deux finales de suite à Roland‐Garros. On n’y arrive pas par hasard. Il a prouvé que sur terre battue il était capable de battre tous les meilleurs joueurs du monde, y compris Rafael Nadal. Il ne l’a pas encore fait en cinq sets. C’est sans doute la seule marche qui lui reste à franchir.
On s’aperçoit qu’il y a désormais beaucoup de joueurs de plus 30 ans dans le Top 10 comme dans le Top 100. Comment l’expliquez-vous ?
Aujourd’hui, les joueurs gèrent mieux leur récupération et leur préparation physique. Ils sont beaucoup plus prévoyants et font des programmations plus fines que par le passé. Dans le même temps, le jeu est plus brutal. Ils repoussent les limites. Désormais, des joueurs qui approchent les 35 ans ou plus comme Nicolas Mahut se disent qu’ils peuvent encore jouer puisque Federer le fait. On repousse les limites du jeu et c’est une bonne chose.
Malgré quelques problèmes, quel bilan faites‐vous du tournoi ?
Toutes ces péripéties sont pour moi anecdotiques. On voulait finir les femmes samedi et les hommes dimanche. On a un vainqueur extraordinaire et Ashleigh Barty est une joueuse dont on va reparler dans l’avenir car elle a un talent énorme. On a malheureusement été confrontés à des conditions climatiques difficiles sur plusieurs jours avec du vent violent et de la pluie. Ce sera du passé en 2020 grâce à notre toit.
De votre envoyé spécial à Roland‐Garros
Publié le lundi 10 juin 2019 à 09:10