Qui l’aurait cru, au début du tournoi, que Na Li remporte Roland Garros cette année. Et pourtant, petit à petit, la Chinoise a fait son nid porte d’Auteuil et s’est envolée cet après‐midi sur les sommets du tennis féminin. Acclamée par les supporters qui pouvaient l’apercevoir par les fenêtres de la salle d’interview, Na Li a décidé d’une chose : savourer !
Si le match avait duré trois sets, nous savons tous que Schiavone est très bonne pour revenir et se battre, surtout dans le troisième set. Auriez‐vous été nerveuse ?
Ma deuxième question, votre pays vient pour la première fois de remporter le tournoi du Grand Chelem, et nous savons que quand Borg a commencé à remporter des tournois du Grand Chelem, ça a vraiment fait démarrer le tennis suédois. Espérez‐vous la même chose pour le tennis en Chine ?
En réponse à la première question, je ne sais pas ce qui se serait passé puisque j’ai gagné en deux sets ! Maintenant, je sais que c’est une grande combattante, mais moi aussi je suis une grande combattante sur le court. On ne sait jamais ce qui peut se passer… Bien entendu, pour votre deuxième question, après une victoire sur un tournoi du Grand Chelem par une joueuse chinoise, ça devrait avoir un effet sur le tennis chinois. La Chine, comme à l’époque la Suède, n’a pas beaucoup de grands joueurs au top niveau, mais je pense que la Chine va vraiment se développer au niveau tennis.
Il est temps pour moi de vous dire : « Gongxi Gongxi » Vous savez qu’en ce moment, en Chine, des millions de personnes regardaient ce match de la finale. Quand rentrez‐vous en Chine, et à quoi vous attendez‐vous de la part de vos compatriotes ?
Vous savez que dans deux semaines, il y a Wimbledon ; je n’ai pas le temps de rentrer en Chine immédiatement. Donc, je ne rentrerai qu’après Wimbledon, et si j’ai de mauvaises performances à Wimbledon, à mon avis, les gens m’auront peut‐être déjà oubliée ! (Rires.)
Je pense que c’est vraiment un très beau moment pour moi, je peux en profiter avec mon équipe. Alors que quand je rentrerai en Chine, j’aurai plein de gens qui viendront me voir, et non seulement j’apprécie ça, j’apprécie le moment avec mon équipe, mais aussi je me recadre sur Wimbledon.
Avoir disputé la finale de Melbourne, cela vous a‑t‐il aidée, notamment à appréhender la réaction du public ? Quand vous avez été breakée alors que vous meniez 4–3, avez‐vous craqué ? Que s’est‐il passé ?
A Melbourne, c’était ma première finale, je n’avais aucune expérience auparavant. Une fois que vous avez disputé une finale, vous savez mieux ce qu’il faut faire sur ce genre de match.
Pour ce qui est du tennis, à 4–3, sur le service, ce n’est peut‐être rien, parce que tant que le juge de chaise n’a pas dit : « Jeu, set et match », il vous reste une chance ! Bien entendu, j’étais nerveuse, quand vous êtes dans une finale, il y a tellement de gens qui sont en train de vous regarder, mais bon… J’ai gagné le match !
Qu’est‐ce qui vous passe par la tête, vous êtes devenue une championne d’un tournoi du Grand Chelem, qu’est‐ce qui vous passe par la tête, vous êtes tout de même en très belle compagnie ?
C’est un rêve devenu réalité aujourd’hui. Je commence à vieillir, je commence à devenir une vieille dame, et donc, transformer son rêve en réalité, ce n’était pas facile. J’étais à 6–0 dans le tie‐break, et je me suis dit : » Allez, ne fais pas de bêtise ! « . Parce que j’ai déjà eu des balles de match, et parfois, je n’ai pas gagné le match. Là, je me suis dit : « Il te faut un point, tu peux le faire. »
Bien entendu, c’est très excitant, il n’y a pas tant de joueurs en mesure de gagner un tel tournoi.
J’ai vu dans votre tribune des gens de votre famille, de votre équipe, qui avaient un tee‐shirt portant des idéogrammes chinois. J’ai pu distinguer, mais je ne sais pas exactement ce que voulaient dire ces idéogrammes. Pouvez‐vous nous expliquer ?
Oui, avant l’Open de Paris, Nike m’a imprimé des tee‐shirts qui disent : » Sois toi‐même « , et donc, ils m’ont demandé : « Est‐ce OK de porter ce tee‐shirt. » J’ai dit oui, bien entendu.
Et donc, Nike a imprimé ces tee‐shirts, une trentaine seulement, mais je pense qu’ils vont en imprimer beaucoup plus, parce que beaucoup de fans vont me les demander !
Vous avez arrêté de jouer en 2002. Vous êtes allée à l’université pour étudier le journalisme. Pouvez‐vous nous expliquer pourquoi ? Pensiez‐vous un jour devenir une si grande championne et remporter un Grand Chelem ?
Eh bien, effectivement, avant, j’étais dans les 120ème joueuse mondiale, et je devais jouer de petits tournois. Il n’y avait aucun défi pour moi‐même. C’est pour ça que j’ai décidé de m’arrêter et d’étudier autre chose, le journalisme. Je ne voulais pas que ma carrière s’achève comme ça, sans débouché. J’ai donc arrêté pendant deux ans. Et puis, il était temps pour moi de revenir et c’est la raison pour laquelle je suis revenue.
Comment avez‐vous préparé ce match d’un point de vue technique et tactique. Vous avez très, très bien géré vos slices, comment avez‐vous géré ce match ?
Après 6 matches, si je n’arrivais pas à jouer des slices, je ne serais jamais arrivée en finale ! Et quand on joue sur terre, mieux vaut savoir‐faire des slices !
Mon mari est également sparring partner, et donc lui aussi sait slicer ! (Rires)
Vous avez dit que votre maman ne vous avait jamais vu jouer. A‑t‐elle regardé le match aujourd’hui ?
Je ne sais pas, je ne l’ai pas appelée, mais la sœur de ma mère lui dit systématiquement : « Ca y est, elle est en train de jouer ! » Du coup elle éteignait la télé parce que ça la rendait nerveuse. Je ne pense pas qu’elle ait regardé les matchs, mais je vais l’appeler tout à l’heure.
Vous avez travaillé avec Thomas Hogstedt de Suède, et avec Michael Mortensen du Danemark, cela a t‑il eu une bonne influence, ou bien l’entraînement pendant de nombreuses années avec votre mari a surtout joué ?
Je pense que ce changement d’entraîneur est quelque chose de normal. Quand vous avez travaillé avec le même entraîneur pendant 5 ou 10 ans, chaque entraîneur apporte des choses positives à chacun des joueurs. C’est la raison pour laquelle, après Melbourne, j’ai décidé de modifier mon équipe et, effectivement, je travaille avec un nouvel entraîneur.
Simplement, pour s’amuser, si vous étiez encore à l’école de journalisme et si votre prof vous disait : « Essayez de nous raconter cette grande joueuse chinoise qui vient de remporter un tournoi du Grand Chelem. » Que diriez‐vous ?
Un rêve devenu réalité ! Oui… C’est ce que j’aimerais dire. En Chine, nous n’avons jamais eu de champion qui ait remporté un tournoi du Grand Chelem, c’est pourquoi il faut travailler si dur. Parce que le rêve peut être de devenir la meilleure joueuse ou de remporter un Grand Chelem, donc mon titre serait un rêve devenu réalité.
Bravo Li Na ! Qu’avez‐vous ressenti lorsque le drapeau de votre pays a été déployé ?
Je trouve que c’est extraordinaire, parce que je n’ai connu cela qu’aux Jeux Olympiques, ou aux jeux asiatiques. Donc, c’était extraordinaire. Et puis, j’ai reçu des textos de mes amis qui sont en Chine et qui ont pleuré quand ils ont vu le drapeau chinois être hissé au mât. Je pense qu’en ce moment, tout le monde en Chine trouve cela extraordinaire.
De votre envoyée spéciale à Roland Garros.
Publié le samedi 4 juin 2011 à 19:10