Crédit photo : KMSP/CNOSF
En l’honneur de son exploit ce jour puisque Tony Estanguet a remporté le 3ème titre olympique de sa carrière, nous vous proposons à nouveau l’entretien qu’il nous avait accordé début Juillet. Chapeau l’artiste !
Porte‐drapeau de la délégation tricolore à Pékin, Tony Estanguet a passé le flambeau bleu‐blanc‐rouge à Laura Flessel, début juin, sur le Central de Roland Garros. Welovetennis/GrandChelem est allé à sa rencontre pour en savoir plus sur l’esprit des JO. Et a découvert un kayakiste qui s’y connaît pas mal en tennis…
Vous pensez que le tennis a sa place dans le concert olympique ?
Au départ, il y avait beaucoup de réticence, c’est certain. En fait, les meilleurs joueurs n’étaient pas toujours présents au rendez‐vous. Depuis ce faux départ, les choses ont beaucoup évolué et tous les joueurs du monde ont inscrit les Jeux Olympiques comme un événement majeur de leur carrière. Et ça fait une vraie différence. Savoir que Novak Djokovic, Roger Federer, Rafael Nadal (ndlr : l’entretien a été réalisé avant le forfait de ce dernier) ou Jo‐Wilfried Tsonga vont se battre pour une médaille, ça confirme que le tennis est un vrai sport olympique.
Comment expliquez‐vous ce mouvement ?
C’est peut être une question de génération. En tout cas, aujourd’hui, il y a une vraie joie et un honneur à représenter son pays aux JO, même quand on est joueur de tennis. Ca, je le ressens et on le constate aussi avec Nole et Rafa qui sont porte‐drapeaux (ndlr : l’entretien a été réalisé avant le forfait de ce dernier). Le tennis fait maintenant partie des meubles ! (Rires)
Ca veut qu’on a trouvé notre place ?
Oui, c’est ce que je dis. De toute façon, je considère qu’il y a de la place pour tout le monde et pour toutes les disciplines majeures. Il serait illogique de se priver des plus grands champions de la planète. C’est pour ça que l’arrivée du golf ou du rugby ne me dérange pas plus que ça. Les Jeux Olympiques doivent rester le plus gros événement sportif de la planète. Je suis d’ailleurs satisfait de constater que le Comité International Olympique est ouvert, curieux, prêt à faire évoluer les mentalités. Après, quand on fait entrer de nouvelles épreuves, on est aussi contraint de faire des choix, car il faut en sortir d’autres.
Pourtant, ces trois disciplines – le golf, le tennis, le rugby – font partie de celles où l’argent est assez présent, à des niveaux divers…
Je m’attendais à cette question (rires). Au final, c’est tout à fait secondaire. Et je suis très sincère, ce n’est pas de la langue de bois. En effet, ce qui nous guide, c’est la performance et le fait de tout réunir pour parvenir à décrocher une médaille. C’est ça, le ciment de l’équipe de France, que l’on soit judoka, tennisman ou kayakiste.
Parmi les joueurs qui vont se rendre à Londres, lequel voudrais‐tu rencontrer ?
J’ai toujours apprécié l’idée d’avoir une technique tout à fait parfaite. D’ailleurs, c’est ma ligne de conduite dans ma discipline. Inutile de vous dire que, pour moi, « champion de tennis » rime avec Roger Federer. Mais, malheureusement, on n’a pas tellement le temps d’aller à la rencontre des participants étrangers. Je me souviens juste d’avoir croisé Rafael Nadal, il y a quatre ans, ce fut plutôt bref (rires) !
Quand tu as été porte‐drapeau en 2008, est‐ce que tu t’es attaché à donner des conseils à l’équipe de France de tennis ?
Ce type de dialogue n’existe pas entre les sportifs de haut niveau et, de toute façon, je n’aurais pas osé. En revanche, je me souviens d’une rencontre avec Jo‐Wilfried Tsonga, lorsque j’ai été nommé, c’était très sympa. J’entretiens aussi de bonnes relations avec Arnaud Di Pasquale (responsable de la délégation française pour le tennis aux JO, médaillé de bronze à Sydney), d’autant plus que sa médaille à Sydney constituait un vrai petit exploit. Entre médaillés, il y a une certaine forme de solidarité et ça perdure avec le temps. On peut appeler ça l’ « esprit olympique ».
Arnaud t’a demandé des conseils pour bien préparer ces Jeux de Londres ?
Oui, nous avons échangé. Et j’ai tout à fait compris leurs choix. Notamment celui de ne pas être au Village durant la totalité de la compétition. Ca me plaît, parce que c’est un choix est dicté par l’objectif d’être le plus performant possible, d’être dans des conditions optimales de préparation.
Par le passé, ça aurait pu poser des soucis ?
Le Village, c’est un vrai symbole, c’est toute l’histoire des Jeux. Mais, à Londres, il y a un souci de distances entre les sites et compromettre son épreuve par principe, sans se soucier des soucis logistiques, ce serait un suicide. S’installer tout près de Wimbledon, dans des maisons, c’est le bon choix, celui de la raison, qui peut permettre, à l’équipe de France, d’aller chercher une médaille. Je sais que c’est un de leurs objectifs.
Pour revenir au tennis, tu pratiques un peu ?
Plus maintenant ! Mais, quand j’étais jeune, on avait un court de tennis à quelques mètres de chez nous. Je me souviens de parties endiablées avec ma famille, mon frère… Mais j’avoue que je n’ai jamais atteint un niveau extraordinaire (rires) !
Qu’est-ce que tu apprécies tout particulièrement dans ce sport ?
Le point qui me sidère – et je pèse mes mots –, c’est la capacité à se concentrer sur une si longue période. Se remettre en cause après chaque point, d’autant qu’à haut niveau, chacun de ces points compte. Le tout, en maîtrisant technique et physique. C’est vraiment impressionnant ! Je suis très admiratif et respectueux. Dans ma discipline, on a deux passages qui durent pas plus d’une minute trente ; je trouve déjà que rester hyper concentré sur cette courte période demande un effort surhumain… Si on rajoute à ça la gestion des émotions, je trouve que les champions de tennis sont vraiment des sportifs remarquables.
Un petit mot de toi, maintenant… Que vises‐tu à Londres ?
Je reviens de loin, donc parvenir à décrocher un podium serait déjà un petit exploit.
Il fut un temps où tu te battais contre ton frère pour la sélection olympique. Ca a laissé des traces ?
Non, au contraire, puisqu’aujourd’hui, mon frère est mon entraîneur, on partage encore plus de moments forts. On continue l’aventure olympique ensemble, c’est vraiment géant ! Je le répète, les Jeux Olympiques restent un événement unique et souvent mémorable.
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Publié le mardi 31 juillet 2012 à 16:32