Suite aux commentaires de nos lecteurs et au regard du temps qui se refroidit, Mamy Apolline a décidé de faire un petit feu de cheminée et de raconter une belle histoire aux enfants.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, Ivan Lendl, immense champion sous‐estimé de l’histoire du tennis (donnons une statistique simple pour le comprendre : huit finales de suite à l’US Open) a traîné une réputation de poule mouillée, en anglais chicken. On a à tort relié ce sobriquet au fait d’avoir commencé sa carrière en perdant quatre finales de Grand Chelem dont la plus humiliante en 1983 à l’Us Open contre Jimmy Connors (merci lui‐même, Apolline a rectifié), en se dégoulinant totalement dessus au 3ème set (7−5) puis en balançant très clairement le 4ème (6−0) devant un Jimbo chambreur en diable. Et pour cause, c’est bien lui, Connors, qui avait été à l’origine de la vraie anecdote sur le chicken.
On est deux ans et demi avant, en janvier 1981 aux Masters à New‐York. Connors et Lendl sont dans le même groupe, ils ont gagné leur deux premiers matches, ils sont dores et déjà qualifiés. Le problème c’est que le vainqueur de ce match, finissant premier et jouant comme d’accoutumée le deuxième de l’autre groupe, aura le redoutable honneur de rencontrer… Björn Borg. C’est en effet Gene Mayer qui a fini premier dans son carré.
Lendl et Connors jouent le premier set dans les règles. Connors le remporte 7–6. Lendl lâche alors très ostensiblement le match et prend 6–1 dans le 2ème. Dans d’autres circonstances et face à un autre adversaire, la chose serait passée. Mais face à Connors et à son idée du tennis comme duel intime joué jusqu’à la mort, ça ne passe pas du tout. Connors débarque en conférence de presse, et vénéneux comme jamais, balance le fameux « Chicken » sur ce que vient de faire Lendl. Connors joue Borg en demi et perd. Lendl joue Mayer et gagne. Il atteint ce qu’il était venu chercher, cette finale des Masters. Il la perd entre trois sets secs contre Borg.
Si vous demandez à Apolline ce qu’elle pense de tout ça : elle vous dira effectivement la même chose que Connors. Lendl, chicken !
Mais par les temps qui courent, vu le froid de canard qui s’étend sur la France, votre vieille mémé ne va pas vous laisser perdue dans la forêt avec votre parabole sans savoir quoi en faire. Elle a en stock sa petite collection de cache‐nez pour les bambins frileux. La question qui court depuis deux jours est la suivante : Murray devait‐il jouer à fond contre Federer. La bonne réponse est : oui, évidemment. On n’aura pas assez de Murray‐Federer à venir pour comprendre l’importance de ce match. A‑t‐il perdu les Masters à cause de ça ? Absolument pas : Davydenko était plus fort en demi, comme Nalbandian était plus fort à Paris. Murray l’a lui‐même reconnu : point final.
Ce qui est juste un peu comique, c’est qu’un grand journaliste français de tennis entame son papier en glorifiant très justement l’attitude de Murray, en la glorifiant d’autant plus que ce journaliste a déjà révélé à Apolline que les petites magouilles du sport moderne, la petitesse des champions, de leur encadrement, le sport devenu cette « bourse des gogos », tout cela l’insupportait au plus haut point. Eh bien c’est ce même journaliste qui devant la caméra d’Apolline il y a 6 ans lui a raconté l’histoire du chicken… en défendant Lendl, en disant que toute personne un peu censée aurait balancé le match après avoir perdu le 1er set, surtout dans l’expectative d’éviter Borg en demi‐finales, et en laissant entendre que Connors s’était un peu facilement acharné.
Ca va vraiment très vite le tennis.
Publié le dimanche 16 novembre 2008 à 14:15