»Bon je craignais ce scénario, la saison va être longue pour Roger, je le sens ». Il est 4h48 sur Welovetennis.fr et Tonton Franck, assommé, livre déjà ses impressions à peine le fil info du résultat publié. Lucide, presque trop, en quelques mots, il décrit avec une certaine cruauté l’impression générale que ce « revival » fait résonner en moi.
Réveil réglé, je ne m’attendais pas à vivre une épopée lyrique, mais force est de constater qu’il n’y a pas eu réellement de match. Fidèle à lui même, à ses principes, et à sa forme du moment, Rafael Nadal nous a ressorti sa boite à coups droits lassos alors que le Suisse, pris de vitesse, ne pouvait que faire sa tête des mauvais jours. Heureusement qu’il y eut ces éclairs helvétiques à 4–6 0–3, pendant deux jeux, pour me faire oublier la fatigue d’une nuit assez courte. Oui, je sais, c’est trop peu, mais, à ce moment précis, Roger trouva le rythme, son rythme, en frappant la balle plus tôt et en tentant de déborder l’Ibère. On se rassure comme on peut.
Mais tenter de déborder cet Ibère, c’est aussi s’exposer à la fatigue, à une vraie dépense d’énergie que le Suisse ne possède plus vraiment, surtout quand, au tour précédent, il a déjà fallu griller des calories. On ne lancera pas le débat du déclin, mais plutôt celui d’une carrière plus proche de la fin que du début.
Car pour aller chercher Rafael Nadal, mort de faim et revanchard, il faut avoir envie de sortir les gants. Ce soir, visiblement las, Roger avait, semble‐t‐il, davantage le goût pour le voyage et l’oisiveté – et ses mains si précises étouffées par une paire de moufle hivernale.
Alors le plus grand champion de tous les temps, au fil du match, s’est peu à peu éclipsé, préférant sûrement songer à son prochain mois de repos plutôt qu’au public californien, chaud bouillant prêt à s’enflammer. Quatre breaks et un revers bas‐duf’ pour clore les débats, cela fait beaucoup. Presque trop. Rafa, respectueux de l’histoire, a juste levé un bras puis, rapidement, s’est empressé de serrer la main à celui qui lui a toujours permis de se sublimer. Roger lui a glissé un mot et l’Espagnol est alors retombé en enfance, avec ce que cela comporte, cette grimace, ce sourire gêné de l’élève dominant le maître, comme il y a une poignée d’années. Comme au bon vieux temps. Le tennis est toujours une leçon de vie, le combat des esprits, surtout quand l’histoire nous redonne l’immense honneur de retrouver deux champions de ce niveau face à face.
Mais il arrive aussi que l’histoire n’en fasse qu’à sa tête et se trompe de timing. Alors le duel devient presque un petit calvaire que l’on soit fan de Rafa ou amoureux de Roger. Il est temps que je me remette sous la couette, avant que Djokovic et consorts, effacent définitivement l’idée qu’il fut un temps où deux hommes avaient décidé de nous enivrer à coups de raquettes, revers à plat et diagonales enflammées.
Publié le vendredi 15 mars 2013 à 05:14