Le constat est cruel mais pas un seul joueur tricolore est en huitième de finale. Et si notre système est loué à l’étranger, il y a deux façons de réagir : croire que c’est une fatalité ou essayer à un moment de changer les choses. On se contentera de faire deux ou trois constats qui résument parfaitement l’idée qu’être top 20 en tant que joueur tricolore est un métier déjà très agréable et aussi très lucratif.
Dans son discours de remerciements ce dimanche sur le central de Roland‐Garros, Julien Benneteau n’a pas oublié de dire un mot sur ses entraîneurs de grand talent qui lui ont permis de produire la carrière que l’on connaît. On ne peut pas en vouloir au Bressan de donner un dernier signe à ses pères, d’autant qu’on le soupçonne aussi de vouloir déjà débuter une nouvelle carrière au sein du giron fédéral.
Ceci dit, il convient aussi juste de regarder qui entraîne qui pour comprendre aussi où le bât blesse. Pouille c’est avec Manu Planque, pur produit FFT, Richard Gasquet avec Fabrice Santoro et Thierry Tulasne, Gilles Simon avec personne, Benoit Paire avec son pote. Or si l’on veut bien regarder ce qu’il se passe chez les « vrais » champions, il y a finalement deux méthodes qui produisent des résultats. La première est celle des compétences quelle que soit la nationalité des intervenants. On pense ici par exemple à Sam Sumyk avec Garbine Muguruza ou encore Patrick Mouratoglou avec Serena Williams. Il s’agit alors d’oublier une certaine forme de confort, de confronter ses avis et de partager une énergie tourner vers la performance. L’autre encore plus commune est celle de la fameuse cellule familiale, comme c’est le cas pour Rafael Nadal, Alexandre Zverev, Caroline Wozniacki et… Caroline Garcia.
Alors certes M. Garcia n’a pas un parcours de joueur, ni de technicien mais c’est peut‐être cette forme de naïveté qui l’oblige chaque jour à se remettre en cause, à déléguer et à oublier ce que prônent des spécialistes ancrés dans leurs certitudes. Car il faut bien avouer, il est assez inutile de répéter que le talent de Gaël Monfils a été gâché, qu’il aurait pu gagner plusieurs tournois du Grand Chelem. C’est mal connaître le joueur mais aussi tout le flying circus qui entoure ce champion. La vie est une ambition et au tennis, aujourd’hui, il faut être un vrai moine pour parvenir à atteindre des objectifs élevés. Et la vie de moine c’est bien connu c’est 8 heures de travail, 8 heures de sommeil et 8 heures de prière. D’après nos sources, on est loin de ce mode de vie et si Rafa peut aligner 6 heures de tennis en mode préparation sans broncher et en prenant du plaisir, nos Tricolores se contentent au mieux de la moitié. Ce n’est pas dire du mal, c’est simplement constater des faits, être pragmatique et expliquer que nos joueurs sont à leur place.
On pourra juste regretter que Gaël Monfils confonde vie personnelle et mental de sportif, que Lucas Pouille soit déjà dans la peau d’un top player au niveau sponsoring avant même d’avoir gagné des titres et que Richard Gasquet n’aura jamais fait les efforts sauf sous l’ère Piatti (en 2013, sans doute sa meilleure saison) pour avoir un classement digne de la qualité de sa main.
Maintenant, il faut aussi insister sur un point, on a vécu une période assez faste et il faut savoir accepter des moments de disettes pour repartir à la conquête de la gloire. Le risque malgré tout est que sans réelle locomotive, nos espoirs finissent par ne plus exister vraiment. Heureusement, Roland‐Garros pourra toujours financer notre système de formation et ainsi de permettre à certains talents d’éclore pour garnir le top 100. De là à gagner un tournoi du Grand Chelem, rien n’est moins sur, d’autant qu’il est certain que cette génération qui nous a donné beaucoup d’espoirs risquent bien d’être aux manettes dans peu de temps.
De votre envoyé spécial à Roland‐Garros
Publié le dimanche 3 juin 2018 à 18:07