Que faut‐il penser du grand barnum monté par Mahesh Bhupathi ? C’est la question que l’on peut légitimement se poser quand on est un passionné de tennis, quand on aime ce sport pour son histoire, ses duels homériques, ses combats tactiques et ses retournements de situations.
Le tennis est‐il vraiment un show ? Faut‐il en transformer les règles pour le rendre plus sexy ?
Mahesh Bhutapi ne s’est sûrement pas posé toutes ces questions lorsqu’il a commencé à imaginer son projet. Il a juste débuté par le nerf de la guerre : les agents. Et il savait comment s’y prendre, lui qui fut un temps au service d’Andy Murray. Malin, il a donc flairé le bon filon, et n’a pas eu de mal à convaincre ses collègues, tous très contents de pouvoir toucher une prime de fin d’année toujours bien utile surtout par ces temps de crise.
Après, il fallait bien sur trouver une région du globe en manque de sensations fortes, et ce pour pouvoir marquer son discours, avoir une certaine légitimité, en gros, faire du marketing. Pour y parvenir Mashesh a bien été aidé par Roger Federer, roi du merchandasing à double lames et qui a prouvé avec son Gillette Tour que tout était possible tant qu’un sponsor international mettait la main à la poche et allongeait les dollars.
Le tennis, dans tout ça ?
Ben pas grand chose, des matches en 5 jeux, des rencontres avec des idoles, des jeunes, des vieux, des filles, des espoirs, des inconnus, et surtout des stars.
Et là, on peut clairement tirer la sonnette d’alarme et se dire que ces stars se foutent un peu de notre gueule sur leur discours de calendrier. L’on peut même avoir l’intime conviction que ces revendications n’aient été effectuées que finalement pour pouvoir caler de plus en plus d’exhibitions à leur portefeuille. Car l’exhibition est à peu près chez le joueur de tennis moderne ce que représentaient jadis les critériums pour le stars du cyclisme des années 80. En gros, un chèque sans la sueur, sans le risque ou le combat, bref, une comédie raquette en mains, qui peut‐être drôle mais rarement intéressante.
Au delà de ces critiques faciles, mais justifiées, il convient aussi de comprendre que visiblement l’ATP ainsi que l’ITF ne soient pas toujours en phase avec les attentes des stars du circuit. Leur rébellion dernièrement sur le prize money est passée en force sans toute fois changer la donne. Beaucoup d’entre eux s’estiment donc sous payés par rapport au rendement de certaines compétitions internationales, et surtout peu impliqués dans les choix financiers. D’un côté on peut les comprendre, d’un autre, on peut aussi considérer que ces stars vivent dans un autre monde, bien loin des préoccupations de certains directeurs de tournoi, ou pire, de certaines marques du marché du tennis étranglées par une pratique en perte de vitesse dans certaines régions du globe.
Alors forcément, il y aura des sommes indécentes qui vont circuler lors de cette IPTL. Il conviendra alors pour éviter l’étouffement de respirer un grand coup, d’ oublier l’idée que ces « élites » pensent à leurs collègues classés au delà de la fameuse 100e place mondiale qui se tapent des challengers ou des futures sans âme pour accrocher le graal. Il faudra aussi y voir, une naïveté de la part des sponsors qui vont soutenir cette « tournée », des télés qui vont en acheter les droits et des médias qui vont en faire les choux gras.
En revanche, il ne faut pas douter une seule seconde du succès populaire d’un tel déchaînement de stars, sachant que comme la recette « guichet » n’est qu’une goutte d’eau pour ce genre d’évènements, les stades seront sans nulle doute remplis à ras bord voir bourrés comme pour certaines élections en pays en voie de développement. Tout cela assura un succès populaire réconfortant pour l’ensemble des investigateurs, des payeurs, et des joueurs venus passer des vacances aux frais de la princesse.
Il y a des sports qui ont marqué nos esprits, notre culture et qui ont peu à peu perdu leur aura, leur saveur, parce que quelques mécréants ont voulu en faire une machine à cash les transformant en spectacle sans saveur. On pense forcément à la boxe par exemple. Il faudrait donc juste que nos stars d’aujourd’hui, Rafael Nadal et Novak Djokovic en tête, se souviennent juste que c’est l’histoire du tennis qui fait d’eux des idoles et non l’inverse, et que quelques fois, quelques billets verts en plus ne changent pas une vie.
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Publié le dimanche 2 mars 2014 à 18:50