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Rafael Nadal et l’idée d’une dépres­sion tennistique

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On ne vous apprendra rien en vous expli­quant qu’a­vant une dépres­sion il y a des signes avant‐coureurs. Sans vouloir jouer les Cassandre, il semble bien que Rafael Nadal soit aujourd’hui dans un climat mental peu propice à la perfor­mance, et on aime­rait donc apporter quelques explications.

« Il n’a plus son regard, avant quand tout était perdu, il y croyait encore, là, j’ai l’im­pres­sion que Rafa n’est plus Rafa et qu’au final, il baisse un peu les bras, il se résigne à ». Ces quelques mots entendus sur la tribune du court 11 à Monte Carlo lors du premier entrai­ne­ment du cham­pion espa­gnol m’avaient un peu surpris d’au­tant que sur la terre battue moné­gasque pendant ces deux heures Rafa n’avait pas ménagé sa peine. « C’est toujours comme ça avec Rafa, c’est pour cela que j’adore m’en­trainer avec lui » avait expliqué juste après au média day le futur vain­queur Stanislas Wawrinka. 

Alors même qu’il frap­pait avec force et vigueur le matin, Rafa était plutôt labo­rieux sur le court en compé­ti­tion. Sans être une surprise, son début confir­mait juste que passer du dur à la terre n’est pas une siné­cure et que le temps d’adap­ta­tion même pour un spécia­liste peut être long, enfin presque, puisque Novak étrillait comme il se doit ses adver­saires. Mais ce paral­lèle ne sert à rien, et fina­le­ment, alors même que l’on pensait Rafa dans le bon tempo, son jeu s’est éteint presque natu­rel­le­ment face à un David Ferrer, opiniâtre, mais que l’on a déjà vu beau­coup plus performant. 

Déjà au média day, on avait senti Rafa, tendu, presque une coutume quand il s’agit d’aborder la période de l’année la plus impor­tante pour lui. Mais au final, cette nervo­sité tradui­sait un vrai manque de confiance, pire, selon nous, une certaine lassi­tude. Enfin, c’est ce que l’on ressen­tait sur le moment avant que ses propos à Barcelone ne confirment que l’Espagnol n’est pas encore sorti d’une période qui aura marqué défi­ni­ti­ve­ment son esprit. Car perdre en finale de l’Open d’Australie en se bles­sant a été plus qu’une décep­tion, comme un aveu, celui qui consiste à lui faire comprendre que son corps peut lui jouer des vilains tours alors que l’es­prit lui est maitrisé, toujours sous contrôle

« Aucun autre joueur de mon niveau n’a été aussi péna­lisé par des blessures »

« Aucun autre joueur de mon niveau n’a été aussi péna­lisé par des bles­sures » voilà comment Rafael Nadal analyse sa carrière alors même que l’on sait qu’au fond, en disant cela, il exprime une réelle frus­tra­tion. De la frus­tra­tion à l’aga­ce­ment il n’y a qu’un pas, et ce pas là, il est entrain de le fran­chir. A 28 ans, l’Espagnol peut légi­ti­me­ment manqué d’envie et ce d’au­tant plus s’il consi­dère que le sort est contre lui, s’il croit que revenir à chaque fois est un effort trop insur­mon­table, répé­titif, lassant. 

Et dans son nouveau regard, ou pour la première fois on perçoit un peu de vide, c’est tout cela qu’ex­prime le numéro 1 mondial. Il y a un grand cham­pion, lui aussi spécia­liste de l’ocre, qui un jour s’est réveillé sans trouver de sens à aller s’en­traîner. Bien sûr, on ne dit pas que Rafa en est là, d’ailleurs vu la pres­sion fami­liale, il ne le pour­rait pas. En revanche, il est évident que si son Roland Garros se passe mal, l’en­fant qu’il est resté pour­rait alors soit péter un plomb, soit évoqué du repos, soit ranger son sac. Tout cela pour oublier l’idée ou l’ef­fort qu’il aurait fallu produire pour revenir à ce fameux meilleur niveau, celui où son corps, son bras, et son cerveau ne font qu’un, c’était hier, presque une éternité…