Il est rare et précieux de vivre une après‐midi scotché sur son canapé entre la 11 et la 80, pour encourager ses joueurs préférés et partager sa passion avec son « jazz manouche », le surnom de mon fils. Je vais donc vous conter ce moment d’une rare intensité. Ne vous inquiétez pas, je vais parler tennis, et avec précision.
Voir le sourire d’Antoine quand Rafa saute comme un cabri au moment le plus important d’un match, c’est comprendre que « Rafalito » est un super‐héros, une espèce d’humanoïde. La scène est simple : mené au score, Rafa lève le doigt en jouant un revers qui file dans le filet. Robin demande le Hawk‐eye : la balle est bonne. Rafa se replace pour rejouer le point mais Pascal Maria lui fait signe de la tête : » Non, on passe au point suivant ». L’Espagnol, pas très bien à ce moment du match, bousculé par le Suédois, sort de ses gonds. Et c’est assez rare pour être souligné. Il discute, s’énerve presque. Après avoir joué à l’adulte quelques minutes : il se replace, reprend sa mine d’enfant, regarde au loin Söderling, avec l’air de dire : « Bravo, quel fair play ! ». Puis, il ferme la parenthèse, repart dans ses rituels (très important les rituels) et commence un autre match, son match. La bête a été touchée là où ça fait mal, et quand une bête est blessée, son instinct de survie rejaillit. S’en Suit donc un « Rafa one‐man‐show » au sommet de son art, tout en explosion. Le match reste aussi intense jusqu’à 5–4 dans le 3ème set, moment où Robin fait habilement appel au kiné. Sur sa chaise, Rafa, chaud bouillant, se refroidit, et enquille deux doubles fautes, c’est maintenant Robin qui saute comme un cabri, suédois celui‐ci. Antoine dans son canapé n’en rate pas une miette. Il sait aussi que Rafa doit gagner cette manche pour rester à l’abri. C’est ce qu’il fera dans un tie‐break très bien négocié. Rafa a confirmé que le tennis reste un sport mental, physique et technique, et qu’il ne faut jamais inverser cet ordre.
Quelques heures auparavant l’après-midi avait débuté par un Federer‐Berdych. Mon p’tit bonhomme avait compris que lors de ce quart de finale, ça allait envoyer du bois : « Qu’est ce que ça joue vite ! ». Hélas, le paternel, qui s’était couché tard la veille ne tenait pas la distance. C’est donc au cours de sa sieste qu’il fût réveillé par son « jazz manouche » : « Papa, papa ! Balle de match, balle de match pour Berdych !». On connaît la suite.
Pour mon Antoine, Federer c’est le Roi, l’intouchable, la classe, quelque chose qui ressemble à une Porscheferrarijaguar, le truc improbable mais que l’on aime regarder avec les yeux.
Enfin ce mercredi ne serait pas complet sans un mot sur Jo. Jo en mode Open d’Australie pendant presque deux sets c’est‐à‐dire jusqu’à 7–6 6–6 5–4 : concentré compact, nadalien. Et puis, un petit brin de « J’y suis, » et de manque de confiance, ce petit brin qui fait qu’il laisse passer la balle à 5 partout : « Jo m’envoyait des missiles sur tous les cotés j’ai juste essayé de faire front » expliquait en conférence de presse, Andy Murray. Il est vrai que l’Ecossais connaît bien les efforts à fournir pour atteindre le dernier carré d’un tournoi du Grand Chelem. Ces efforts, c’est justement ce qui fait la différence entre un Masters 1000 et un Grand Chelem. Et Jo, comme il le confesse lui‐même, continue d’apprendre.
Un seul set en revanche, le soir au club de Pont Evêque, entre mon Rafalito et son Padre. Mais un set où le gamin n’a rien lâché. « Antoine, pense à tes rituels ! » lui aura soufflé tout le long de cette petite heure son père. Cela fait maintenant quelques années que dans le tennis comme ailleurs, il pense que c’est la clé de la réussite !
La vidéo de « l’incident »
Publié le jeudi 1 juillet 2010 à 12:00