WLT a décidé de se pencher sur le dossier du crowdfounding, le financement participatif. Après avoir découvert le projet de Jonathan Eysseric, Yannick Diemer qui s’occupe d’Estelle Guisard, une Tricolore de 25 ans qui a atteint le 228eme rang mondial mais qui a été freinée par des blessures, a expliqué la démarche pour sa joueuse. Précurseurs, ils étaient à l’origine du système avec Tennis Angels en 2010. Estelle, qui suit également des cours à Science Po Paris a décidé de se lancer avec monprojetsportif.com afin de récolter 2 000 euros. Explications.
Yannick, avec Estelle, vous étiez de l’aventure Tennis Angels, des précurseurs pour le financement participatif…
« En fait Tennis Angels, c’était eux qui nous avaient démarché. On avait été mis au courant avant l’ouverture du site, un an et demi avant. On a donc suivi l’évolution du projet. Il était très ambitieux. C’est quelque chose qui n’avait jamais été fait à l’époque pour le sport. Il existait « My Major Company ». Nous, ça ne nous engageait à rien. On s’est donc lancé dans l’aventure en 2010. »
Et comment ça fonctionnait ?
« Il fallait attendre 150 000 euros pour déclencher le financement de trois années à hauteur de 50 000 euros l’année. Je trouvais ça élevé. J’avais proposé la moitié car une saison coûte environ entre 20 000 et 25 000 euros. Et je pense que vu que la somme était élevée, ça a du freiner pas mal de personnes. Si la somme n’était pas atteinte, toutes les personnes étaient remboursées. C’était très clair. Mais finalement, ça n’a jamais décollé. »
Et aujourd’hui vous êtes avec sponsorise.me ?
« Effectivement on est avec sponsorise.me, mais c’est surtout monprojetsportif.com avec les magasins Intersport. En fait, ils ont fait un partenariat entre les deux. Le projet doit être validé par le magasin. Le ou la sportive propose des contreparties. Le magasin aussi, si une personne met 30 euros, Intersport donne 30 euros de bon d’achats dans le magasin. C’est le principe de donnant‐donnant. »
Comment l’idée d’un retour au financement participatif vous est venue ?
« En fait il y avait deux axes. Tout d’abord, on avait hésité de remonter un projet après Tennis Angels. En regardant le site d’Intersport, on est tombé sur monprojetsportif.com. On trouvait l’idée des bons d’achats vraiment sympa. Dans ce principe, la personne qui aide, ne perd rien dans l’opération, car il est difficile de donner aujourd’hui. Le deuxième axe est qu’aujourd’hui les sportifs sont plus accessibles par les réseaux sociaux. Les gens nous demandent beaucoup de choses, comme des sacs… On s’est dit pourquoi pas, mais suivez Estelle et vous aurez des cadeaux. Malheureusement, on n’est pas comme les joueurs de très haut niveau avec 35 sacs à l’année. On essaie de faire du donnant‐donnant. »
Et pour l’instant quelles sont les retombées ?
« Pour le moment c’est très positif ! On est à 1 800 euros de récoltés pour un budget de 2 000 euros. Le principe est le même, si le budget n’est pas validé, tout le monde est remboursé. On devrait y arriver je pense, il nous reste huit jours. On a beaucoup communiqué sur les réseaux sociaux. »
- « Je pense que c’est plutôt un complément de somme »
Combien coûte une saison pour une joueuse comme Estelle Guisard ?
« Pour 2015, la saison fait environ 25 000 euros. C’est à peu près ce qu’elle dépense par année, sans blessure. Une saison à son niveau se décompose : 10 000 euros d’hôtels, avec une moyenne de 75⁄80 euros la nuit, les déplacements pour 7 000⁄8 000 euros, 1 000 euros de pose de cordage, et le reste ce sont les cinq semaines où Estelle sera accompagnée, donc entraîneur, préparateur physique, achat de matériels, les balles par exemple… Ce qu’il faut savoir, c’est qu’Estelle est complètement autonome. Il n’y aucune structure derrière. C’est une chance, on ne dépend que de nous même. »
Justement, comment fonctionne Estelle ?
« On a monté une association qui gère Estelle entre guillemets. Les partenaires sont les sponsors de l’association qui récupèrent l’argent pour financer sa vie tennistique. »
Des joueurs ou joueuses français ou étrangers vous ont demandé des conseils ?
« On en a parlé un peu. On a discuté avec une autre joueuse qui était sur Tennis Angels. Maintenant par rapport à monprojetsportif.com, non pas encore. Tennis Angels avait beaucoup fait parler. Maintenant, je pense que c’est rentré les mœurs, ça ne surprend plus grand monde. Beaucoup de joueurs le font, comme Jules Marie qui est aussi sur sponsorise.me. Ce n’est pas toujours évident de trouver des sponsors aujourd’hui. Même si des gens veulent des sommes qui paraissent faibles, mais si on les met bout à bout, ça paie des inscriptions à des tournois ! »
Pensez‐vous que maintenant le financement participatif est une réelle alternative ?
« Oui ça peut être une alternative. Mais je pense que c’est plutôt un complément de somme, comme avoir 2 000 ou 3 000 euros. Même un grand passionné de tennis aujourd’hui ne va pas se lever et se dire « je vais donner 2 000 euros ». Ce n’est que mon avis. Ça peut marcher dans la limite du raisonnable, avec du bouche à oreille selon moi, avec les connaissances élargies de la joueuse ou du joueur. »
La solution à terme passe quoi qu’il arrive par une révision du prize money des tournois ?
« J’espère qu’on viendra à revoir les prize money des tournois. Aujourd’hui, c’est de plus en plus dur de jouer. Estelle a été 228eme mondiale (en 2010) et elle est 975eme car elle a eu énormément de blessures cette saison. Quand elle perd au premier tour d’un 10 000 , elle prend 38 euros… Et si elle gagne, 800 euros… Si jamais vous faites un tournoi au Portugal ou en Espagne, avec l’avion, l’hôtel et la nourriture, vous perdez de l’argent… L’ITF a développé un système de plusieurs tournois au même endroit. Mais les conditions sont très moyennes, ce sont des tournois sans en être. Le tennis féminin sur les 10 000 , ça devient n’importe quoi. Et ça va devenir de plus en plus compliqué. Avec la crise également, il y a moins de sponsors, donc moins de tournois. Chez les filles, il faut être dans les 80 pour en vivre. C’est sur que ça augmente au sommet du tennis mondial, mais il va falloir revoir l’organisation des 10 000 et en faire des vrais tournois, pas des tournois de plage ! »
Si vous souhaitez soutenir Estelle Guisard dans son projet, c’est ici : http://sponsorise.me/detail-projet/projet/estelle-guisard
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Publié le jeudi 4 décembre 2014 à 14:56