Kristina Mladenovic, surnommée « Kiki », est une personnalité atypique dans le tennis. Attachante, souriante, communicante, la numéro un tricolore s’est confiée pour GrandChelem sur l’aventure de la Fed Cup. Une épopée dans laquelle Amélie Mauresmo joue un rôle fondamental et qui mènera les Bleues à Trelazé, du 16 au 17 avril, pour affronter les Pays‐Bas en demi‐finale.
Affronter les Pays‐Bas à domicile, c’est une superbe opportunité…
« À partir du moment où l’on évolue dans ce groupe France, on a des ambitions. On rêve toutes de soulever le trophée. Mais il y a un point que je n’aime pas : sous‐estimer les autres filles. Aujourd’hui, il y a une forte densité dans le tennis féminin. Même si les Hollandaises sont inconnues du grand public, elles ne sont pas en demi‐finales par hasard, puisqu’elles ont sorti la Russie, à Moscou, avec Kuznetsova et Makarova qui évoluent dans le Top 20. Cela démontre qu’elles sont capables de se sublimer en Fed Cup. Évidemment, sur le papier, nous sommes les favorites et cela semble abordable… »
Pour retrouver une finale de Fed Cup que la France n’a plus disputée depuis 2005…
« Avant tout, nous sommes heureuses de confirmer notre parcours de l’année dernière (NDLR : demi‐finale perdue face à la République Tchèque). Le Groupe Mondial de Fed Cup est très resserré, car on commence dès les quarts de finale. Si on avait perdu contre l’Italie, on ne serait pas en train d’évoquer une demi‐finale à la maison, mais bien un match de barrages pour se maintenir. Alors, oui, cela nous donne des idées et des rêves qu’on a toutes depuis le début. C’est la raison pour laquelle on est rigoureuses et qu’on se donne à fond dans cette aventure. »
Justement, depuis l’arrivée d’Amélie Mauresmo à la tête de la sélection, on sent un véritable esprit de groupe…
« Quand j’utilise le terme « aventure », cela signifie qu’on part de très loin… Aujourd’hui, je parle en tant que numéro un française. Les choses ont évolué, j’ai ce nouveau statut… C’est très plaisant. Je suis très fière des copines, de notre équipe et de son ambiance. Amélie est arrivée alors que nous jouions un match pour rester en deuxième division. Une rencontre où l’on avait été critiquées pour avoir disputé le double décisif contre la Suisse. À l’époque, les Suissesses étaient 139 et 196. Souvenez‐vous, il s’agissait de Belinda Bencic et de Timea Baczincsky… Regardez ce qu’elles font maintenant (sourire) ! »
Qu’est-ce qui a changé avec le capitanat d’Amélie ?
« C’est un tout. Amélie nous apporte sa confiance, son professionnalisme, sa rigueur… Le plus important, ce sont les personnes qu’elle a choisies pour constituer son staff. Je pense au cordeur, au docteur, aux kinés… C’est toute une équipe ! On a créé un véritable esprit de groupe, qu’on ne peut pas construire uniquement sur deux, voire trois semaines dans l’année. Mais, nous, on s’adore, alors on se suit tout au long de la saison, on se retrouve sur les tournois, comme les Grands Chelems, on entretient cette relation… Et puis, on reste un groupe de filles particulièrement humbles. J’ai l’impression que c’est rare dans une équipe… »
Cette complicité se ressent de l’extérieur…
« Même si je ne suis pas très vieille (sourire), j’ai connu le précédent staff. Pauline Parmentier, par exemple, a un esprit d’équipe absolument incroyable ! Elle possède une sacrée personnalité, quelque chose qui est nécessaire dans un groupe, car cela installe toujours une bonne ambiance. Elle est très généreuse, très déconneuse, c’est un catalyseur. Avec Caroline Garcia c’est aussi très spécial, d’autant qu’’on a commencé à disputer les doubles ensemble sur le circuit. »
Votre association, c’est aussi une belle histoire…
« On a des projets communs dans nos carrières individuelles. Il y a quelque chose de très fort entre nous. C’est une relation rare dans ce milieu. Les gens pourraient croire qu’il y a de la concurrence, voire de la jalousie, car nous sommes toutes les deux de la même génération (NDLR : 1993). Or, ce n’est absolument pas le cas. »
- « On a créé un véritable esprit de groupe. On entretient cette relation. »
Finalement, chacune a son rôle dans l’équipe ?
« Bien sûr ! C’est ce qui fait notre force. Pour prendre l’exemple de la rencontre face à l’Italie, Caro et moi savions dès le début que nous allions jouer les simples. Mais, si tout a bien fonctionné, c’est aussi grâce à l’état d’esprit des autres filles qui sont prêtes à rentrer sur le court. Tout part des membres du staff, dont la mentalité est irréprochable et la générosité extrême. On a toutes des caractères et des égos différents. Chacune se respecte avec le regard tourné vers le même objectif. »
Cette aventure, que signifie‐t‐elle ? Porter le maillot bleu a forcément une saveur particulière…
« Depuis que je suis toute petite, j’ai des rêves : gagner des grands titres, être numéro un mondiale, mais aussi jouer pour l’équipe de France. Quand on est athlète de haut niveau, quel que soit son sport, on a ce rêve de voir sa nation se mobiliser derrière ses performances. C’est quelque chose de valorisant. C’est exceptionnel de me dire que je représente ce qui se fait de mieux en France dans ma discipline. C’est un honneur, une fierté. Je ne veux pas décevoir. D’autant que ces week‐ends de Fed Cup sont éprouvants. On ne joue pas que pour soi et on en sort deux fois plus courbaturée (rires) ! Mais c’est génial. L’objectif : être irréprochable, réaliser de belles choses pour faire vibrer les gens… car on sait, soi‐même, à quel point on vibre devant les autres équipes de France. »
Le fait d’avoir eu des parents qui ont été internationaux dans leur sport t’aide et t’apporte cette expérience ?
« Exactement ! J’ai la chance d’avoir cette culture. On constitue des individualités, on vit seule avec sa propre carrière – et c’est normal, le tennis étant un sport individuel. Mais, en Fed Cup, on se retrouve dans un groupe ; il faut apprendre à vivre ensemble, à être généreuse et mettre de côté son égo… »
C’est difficile ?
« Pour moi, non, car je viens d’une famille qui a vécu dans le sport collectif. Les meilleures joueuses ne gagnent pas forcément la Fed Cup. On le voit, les Italiennes et les Tchèques possèdent également cette culture. Il n’y a pas de secret. L’ambiance au sein du groupe est primordiale. »
J’ai cru comprendre que ton surnom était « Kiki‐pédia » dans l’équipe…
« Oui (rires) ! En fait, mon surnom, c’est « Kiki », mais on m’appelle aussi « Kiki‐pédia », car j’adore ce côté tactique, j’observe toutes les joueuses… Je ne sais pas si je les connais toutes, mais je passe énormément de temps à regarder les autres filles. J’adore ça ! C’est peut‐être ce qui me permet de mettre en place des plans de jeu. Je parle aussi six langues, je peux jouer le rôle de traductrice (rires). Bref, le staff n’a pas mis longtemps pour me trouver ce surnom ! »
Les Bleues en Fed Cup…
2 titres en 1997 et 2003
2 finales en 2004 et 2005
En cas de qualification, les joueuses d’Amélie Mauresmo affronteront les gagnantes de l’autre demi‐finale qui oppose la Suisse à la République Tchèque, à Lucerne.
Si c’est la Suisse… la France se déplacera.
Si c’est la République Tchèque… la France recevra.
L’étonnante équipe hollandaise
Il faut être honnête, affronter les Pays‐Bas à domicile constitue une très belle opportunité de se qualifier pour la finale de la Fed Cup. Au moment de la publication du Groupe Mondial, les Bleues s’attendaient plutôt à défier l’armada russe, finaliste en 2015. Que nenni ! Les Hollandaises ont créé l’immense sensation du premier tour en s’imposant 3–1 à Moscou, au terme d’un week‐end marqué par la polémique autour de Maria Sharapova. Masha, qui n’a pas disputé le moindre match en raison d’une douleur au bras, était simplement dans le groupe d’Anastasia Myskina pour être en conformité avec le règlement dans l’optique des Jeux Olympiques de Rio.
Les filles d’Amélie Mauresmo s’apprêtent donc à affronter une équipe néerlandaise qui possède uniquement une joueuse dans le Top 100 : Kiki Bertens, 96ème. La formation de Paul Haarhuis semble bien inférieure sur le papier. Néanmoins, Bertens et Rus connaissent le haut‐niveau puisqu’elles ont atteint respectivement le 41ème et 61ème rang mondial. Surtout, les Oranje s’appuient sur l’expérience de leur capitaine, ex‐18ème mondial et ancien numéro un mondial en double, pour transcender un groupe homogène. Alors méfiance…
Publié le jeudi 14 avril 2016 à 10:02