Laurent Blary est chef de produit cordage, pour la marque Tecnifibre, un acteur historique du secteur. Ce spécialiste donne son avis sur les tendances et les évolutions du cordage, un élément décisif du matériel tennis trop souvent galvaudé.
L’un des grands acteurs du marché, c’est Tecnifibre. Mais, Laurent, c’est quoi réellement le cœur de votre savoir‐faire ?
L’ADN de la marque, c’est le multifilament. En fait, au début des années 80, on a identifié un problème : sur le marché, les joueurs n’avaient que deux choix, le boyau ou le nylon. Il n’y avait pas de produit qui pouvait allier une forme de compromis avec des particularités propres. A partir de ce constat, l’équipe de Recherche et Développement a commencé à faire des tests, des recherches. Il fallait trouver une innovation qui propose des qualités proches d’un boyau et la robustesse d’un nylon. C’est ainsi que le multifilament a vu le jour.
En somme, c’est un boyau synthétique…
Pas vraiment. Le multifilament, ce n’est pas un ersatz de quelque chose. Il possède son identité et ses qualités propres. Il répondait et répond toujours à une véritable attente sur le marché. Je pense qu’il faut vraiment parvenir à simplifier le discours sur le choix d’un cordage. Souvent, le consommateur me semble perdu, d’autant que la gamme est importante et les acteurs plutôt nombreux.
On nous a dit que le cordage représentait 50% de la performance d’un joueur. Vous êtes d’accord avec ce ratio ?
Je suis assez d’accord, oui. 50% pour la raquette et 50% pour le cordage. Mais la relation raquette‐cordage a énormément évolué. Les cadres n’ont plus les mêmes priorités que par le passé. Avant, on recherchait la puissance par le cordage, maintenant, c’est l’inverse. Les raquettes sont devenues puissantes, le cordage doit ainsi servir plutôt à la maîtrise et aux sensations. Après, il faut bien distinguer les joueurs compétiteurs et les autres. Ils n’ont pas les mêmes attentes, ni les mêmes objectifs de rentabilité et d’efficacité.
Le cordage hybride a été annoncé, passée une période, comme la révolution incontournable. Qu’en est‐il aujourd’hui ?
C’est une idée qui a fait son temps. En fait, le gros problème, c’est qu’il n’y avait pas un hybride identique. A un moment donné, des marques ont lancé des kits tout prêts, mais ça n’a pas percé. Pour moi, ce n’est pas la solution tant expliquée. L’hybride, c’est de la customisation, c’est du tuning pour le très, très haut niveau. Et c’est difficilement applicable pour un joueur de tous les jours.
Question bête : quand faut‐il changer de cordage ?
On a tendance à dire qu’il faut changer autant de fois par an que l’on joue par semaine. Si l’on joue une fois dans la semaine, il faut changer de cordage une fois par an. C’est plutôt simple.
Il y a une tendance à la surtension ?
On ne l’avait pas observée quand on était cordeur officiel de Roland Garros. D’ailleurs, jouer avec un cadre moderne à 20 kilos de tension, c’est presque impossible, en fait. Selon moi, il n’y a pas de surtension.
Quelle est votre position sur les fameux polyesters ?
Sur les polyesters, on a voulu apporter plus de confort. Toutes les études ont prouvé que ces cordages étaient plus traumatisants que les autres. A partir de ces constatations, on est parvenus à sortir le Black Code, en 2009. Depuis, c’est un hit de notre gamme, un vrai succès. D’ailleurs, le noir est devenu une couleur à la mode avec l’arrivée, un peu plus tard, du RPM Blast de Babolat. Ca marque un secteur !
Il va y avoir encore de grosses innovations dans les années à venir, en termes de matière ou de technique ?
A l’avenir, je pense que le cordage va pouvoir jouer un rôle dans les innovations autour des nouvelles technologies. On peut tout à fait penser qu’il devienne comme un fil électrique et, donc, un support pour communiquer et recevoir des informations. Il ne faut pas oublier que c’est le cordage qui est la partie la plus sollicitée lors de la frappe de balle.
Dernier point, ô combien important ! Quelle est la solution pour que le client fasse le bon choix ?
Faire confiance à son spécialiste tennis. Ils sont constamment formés et sont souvent des cordeurs chevronnés. Ils connaissent les produits. Evidemment, le joueur doit aussi savoir exprimer ses besoins au niveau des sensations, ses envies… Et aussi, ne pas avoir peur de tester de nouveaux produits !
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Publié le vendredi 30 novembre 2012 à 10:00