Un petit titre et puis s’en va ? Sorti en huitièmes de finale à Indian Wells et Miami, Stanislas Wawrinka n’a pas encore réussi à confirmer son coup d’éclat de Melbourne. Si le temps ne presse pas, la pression autour du Suisse augmente aussi vite que les interrogations enflent. Depuis son titre à l’Open d’Australie, Stan’ a un statut à respecter. Un statut pas forcément fait pour lui…
L’ascension d’une montagne est faite de douleur et de sueur. Une fois au sommet, certains décident d’y planter leur tente. D’autres, fiers de leur accomplissement, se contentent de descendre. Stanislas Wawrinka fait indéniablement partie de la deuxième catégorie. Est‐il pour autant condamné à rentrer dans le rang ? S’il est encore trop tôt pour s’interroger sur la capacité du Suisse à rebondir après son succès à Melbourne, sa sortie du jour dans L’Equipe témoigne d’un certain mal‐être. « Mentalement, il y a encore trop de choses dans la tête. Je sens qu’il y a moins de fight en moi. Contre Dolgopolov, j’ai laissé passer des points, voire des jeux, et j’étais hélas indifférent. Il est important de rentrer en Suisse pour définir les nouveaux objectifs. » L’info est lâchée, Stan’ se tamponne du tennis depuis Melbourne. Loin d’être inquiétante pour autant, cette déclaration confirme pourtant un relâchement naturel après la conquête d’un objectif inavoué. Le plus dur lorsqu’on atteint les sommets, c’est de réussir à s’y maintenir. Ces sommets, Stan’ les a rejoint. En triomphant à l’Open d’Australie, le Vaudois a concrétisé le rêve de tout joueur de tennis professionnel. Mieux encore, il est parvenu à mettre fin à l’hégémonie des meilleurs alors que personne ne l’attendait. Une exception qu’il a aujourd’hui du mal à digérer.
La motivation, le moteur du sportif
« La motivation vous sert de départ. L’habitude vous fait continuer. » Cette belle parole sort de la bouche de Jim Ryun, ancien athlète américain médaillé d’argent en 1500 m aux JO de Mexico. Et elle témoigne parfaitement des maux helvétiques. La motivation, Stan’ l’a eu pour atteindre son ultime but. Mais l’habitude, il risque d’avoir bien du mal à la trouver. D’un côté, il sait qu’il a réalisé ni plus ni moins qu’un exploit en arrachant le titre à Melbourne, un exploit difficilement réitérable. De l’autre, il sait aussi qu’il ne sera jamais numéro un mondial et qu’il ne joue pas dans la même cour que les quatre fantastiques que sont Nadal, Djokovic, Federer et Murray. A partir de là, comment trouver la motivation nécessaire pour maintenir le cap ? Lorsqu’un joueur se sait au‐dessus du lot, peu importe son sport, son objectif est de se battre pour devenir le meilleur et faire toujours mieux que les autres. C’est dans ce but que Lionel Messi et Cristiano Ronaldo se tirent la bourre, que Pete Sampras et Andre Agassi le faisaient aussi, qu’Usain Bolt ne cesse de faire tomber ses propres records, que Rémi Cap‐Vert s’acharne sur le fil info pour rejoindre l’insaisissable Pauline Dahlem au sommet de la hiérarchie des rédacteurs. Tous veulent marquer l’histoire. Et l’histoire, Stan’ l’a déjà marquée. Lauréat en Australie, il est entré dans le cercle fermé des vainqueurs de tournois du Grand Chelem. Désormais, que peut‐il faire de plus ?
Remporter un Grand Chelem : une finalité ?
Les tournois du Grand Chelem sont les évènements les plus prestigieux qui soient. En remporter ne serait‐ce qu’un seul bouleverse toute une carrière. Qu’on le veuille ou non, il y a un avant et un après Grand Chelem, d’abord la quête puis la perpétuelle reconquête. Voyez par vous même avec Wawrinka : lorsqu’il atteint, l’année dernière, les quarts à Roland Garros (battu par Nadal) et les demies à l’US Open (battu par Djokovic), Stanimal est alors salué et félicité de toutes parts pour ces beaux parcours, à juste titre d’ailleurs. Mais depuis son sacre à Melbourne, ses éliminations successives en huitièmes à Indian Wells et Miami sont vues comme des échecs. C’est étonnant et logique, injuste et explicable, dommageable mais somme toute inévitable. Le tableau semble effrayant de prime abord. Certains lauréats, comme Marion Bartoli, optent pour la retraite anticipée une fois le Graal soulevé. D’autres, comme Gaston Gaudio (vainqueur à Roland Garros en 2004), en profitent pour exploser sans toutefois répéter leur exploit.
La croisée des chemins
Malheureusement pour lui, Wawrinka se situe à l’exact entre‐deux de ses possibilités. Il n’est évidemment pas, sauf colossale surprise, à la veille de la retraite mais il n’a pas eu besoin de Melbourne pour être pris au sérieux. Enfin pas cette année. En vérité, la réelle explosion du Suisse remonte à l’année dernière lorsqu’il avait tenu la dragée haute à Novak Djokovic en huitièmes de finale. La différence c’est que là où il avait échoué, Stanislas est parvenu à conclure cette fois. Une histoire qui ressemble à s’y méprendre à celle de Richard Krajicek, fierté hollandaise de la fin des années 90. En 1996 précisément, Krajicek, alors 13ème mondial, décroche son seul et unique tournoi du Grand Chelem à Wimbledon. A part ça, trois demies, et quatre quarts en Grand Chelem. Des belles performances qui lui permettent d’atteindre la quatrième place mondiale fin mars 1999. Dans ce cas‐là comme dans celui de Stan’, la couronne vient récompenser une belle carrière avant même qu’elle soit achevée. Une sorte de prix de la combativité comme on en remet lors du Tour de France. Et finalement c’est ça l’histoire de Wawrinka, une récompense remportée à la sueur du front, à la persévérance et au fighting spirit. Stanislas est un alpiniste peut‐être moins doué que d’autres mais qui, grâce au travail, a lui aussi gravi l’Everest. Beaucoup espèrent le voir s’attaquer à d’autres sommets. Lui, désire peut‐être savourer cette victoire inespérée.
La raquette de Stanislas Wawrinka, disponible ici !
Publié le mercredi 26 mars 2014 à 15:54