Il ne reste plus que deux jours avant la fin définitive de l’année 2012. Dernière partie de notre rétro… Un peu d’auto‐promo ! Voici quelques uns des meilleurs articles originaux publiés tout au long de la saison sur Welovetennis. La sélection a été établie par une jeune fille de passage à la Rédaction, qui a laissé son cœur parler ! Bonne re‐lecture !
La rétro WLT est organisée en partenariat avec « Roger, mon amour », le livre tennis événement sur Roger Federer.
Publié le 4 septembre 2012 à 13h51, par Pauline Dahlem
Ce soir à New York, Richard Gasquet va défier David Ferrer. Plus qu’une bête noire, l’Espagnol incarne tout ce que le Français déteste affronter sur un terrain de tennis. Sauf que cette nuit, l’éternel espoir du tennis français se présentera dans les meilleures dispositions possibles pour, enfin, claquer une grosse perf’ en Grand Chelem. Habitué à naviguer dans l’ombre des Tsonga, Monfils et Simon, le Tricolore, dernier survivant dans ce tableau messieurs, ne peut plus se cacher. Richard, c’est maintenant ou jamais.
Espérer, imaginer, s’enflammer puis redescendre sur terre. Brutalement. Autant déçu que dégoûté. Voilà le rituel qu’a vécu, depuis des années, tout fan de Richard Gasquet. Du premier venu, séduit par le culot de ce gamin de 18 ans qui battait l’invicible Federer de 2005, à l’amateur tardif, charmé par cette victoire héroïque sur Andy Roddick en quart de finale de Wimbledon 2007.
Puis, las de manger son pain noir, entre un contrôle positif à la cocaïne et des défaites tout aussi désespérantes les unes que les autres, le fan s’est maintes fois promit d’arrêter de suivre ce phénomène de précocité. Ou plutôt d’arrêter d’y croire. Non Gasquet ne gagnerait jamais rien. Non Gasquet n’arriverait jamais à se faire violence, à tenir son rang, à concrétiser les espoirs placés en lui. Trop talentueux, mais pas assez bosseur. Trop craintif et pas assez matcheur. Il s’en convainc, mais malgré lui, l’admirateur suit discrètement les résultats du joueur. Des coups miracles, et même quelques victoires de‐ci de‐là lui redonnent espoir. Il y croit, il espère. Puis il est déçu. A nouveau. Alors il n’espère plus. Jusqu’au match suivant.
Derrière sa télé, l’admirateur se laisse aspirer par la beauté de ce revers, la fluidité de ces frappes, la souplesse de ce poignet, la puissante fragilité d’un bras si souvent tendu par une crainte aussi intrigante qu’attendrissante. C’est plus fort que lui, ce tennis‐là, tout en style, finesse et timing, il le préfère à celui des Roddick, Del Potro, Tsonga et autres Ferrer, pourtant mieux classés et beaucoup plus réguliers.
David Ferrer justement, c’est le dernier défi que doit se fixer le fan de Richard Gasquet ce soir. Derrière sa télévision, son smartphone ou son PC, il va suivre attentivement les exploits –ou pas – de son joueur de cœur. C’est à tous ces fans que je m’adresse aujourd’hui. Dites‐le vous bien. Si Richard ne le fait pas cette fois, nul besoin d’y croire encore. Pas convaincus ? Voici mes arguments.
Depuis la début de sa seconde carrière, j’entends post Miami 2009, Richard Gasquet n’a jamais abordé un huitième de finale de Grand Chelem dans de si bonnes conditions. Grâce à un tableau « cadeau », le protégé de Sébastien Grosjean a survolé la première semaine sans encombre, et surtout sans se fatiguer le moins du monde. Impossible donc de sortir l’excuse de la fraîcheur physique. Impossible aussi de se cacher derrière un manque de matches ou de confiance. Richard Gasquet se balade, rappelons‐le, avec une médaille de bronze olympique autour du cou depuis la fin juillet. Mieux, il vient d’atteindre la finale du Master 1000 de Toronto, une première dans cette seconde carrière, en ayant battu Berdych, Fish et Isner à la suite.
Impossible encore de se cacher derrière des difficultés techniques ou tactiques. Car depuis plus d’un an, Richard Gasquet a beaucoup progressé dans sa position sur le court et ses intentions de jeu. Il s’est même reconstruit un coup droit digne de ce nom, grâce auquel il trouve désormais beaucoup plus de longueur et peut faire le point de n’importe quel endroit du court.
Impossible enfin d’avancer le manque d’expérience, ou l’attitude comme excuse. Gasquet a fêté cette année ses 10 ans de carrière et fait partie des gars les plus expérimentés du circuit. Son approche et sa gestion des matches, en Grand Chelem notamment, font partie de ses atouts, comme il l’a encore montré hier face à Steve Johnson. L’attitude est également bien meilleure depuis quelques mois. Même lorsqu’il est moins bien, Gasquet s’accroche, serre le poing et ne fuit plus l’obstacle, alors qu’il était coutumier du fait il n’y pas si longtemps encore.
Ne pas fuir l’obstacle, c’est précisément ce que l’on demande à Richard Gasquet ce soir. A Melbourne en début d’année, le Français avait cédé sa place en quart de finale à ce même David Ferrer presque sans combattre. La tête basse, il avait débité son habituel discours post‐ferrerite. « Il ne donne pas de points, c’est difficile. Je n’y arrive pas contre lui, c’est vraiment dur. Oui je suis déçu mais bon, il est vraiment très fort. Et puis, un huitième de finale, c’est déjà pas mal. » Ce discours, je t’en prie Richard, épargne‐le nous ce soir. Rentre sur le terrain en y croyant. Affronte ton adversaire et ton destin de front, sans te cacher. Laisse parler le talent, laisse partir le bras, et bats‐toi jusqu’au bout. Même si tu ne gagnes pas, offre nous au moins un combat digne de ce nom. Un combat d’homme en somme.
Après ce gâchis australien, voici donc venu le temps de se racheter. La revanche, c’est maintenant ou jamais. S’il ne se passe rien, s’il n’y a pas l’ombre d’un frémissement de révolte, d’envie et courage chez le Frenchy, promis, cette fois, je n’y croirai plus. « Il ne faut pas confondre espoir et illusion, car si l’espoir fait vivre, les désillusions peuvent faire le désespoir » écrivait Angélique Planchette. Rêver à l’éclosion de Richard Gasquet au plus haut niveau passerait alors définitivement de la sphère de l’espoir à celle de l’illusion.
Publié le dimanche 30 décembre 2012 à 15:30