AccueilInterviewsGilbert Ysern : "La priorité était de conserver la diffusion en clair"

Gilbert Ysern : « La prio­rité était de conserver la diffu­sion en clair »

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Après la publi­ca­tion d’un article s’in­ter­ro­geant sur les droits de retrans­mis­sion de Roland Garros, la Fédération Française de Tennis a tenu à clari­fier la situa­tion. Ainsi, Gilbert Ysern, direc­teur général, revient sur l’accord signé avec France Télévisions et Eurosport dans le droit de réponse que voici. 

Avez‐vous été contraint de parvenir à un accord pour les droits de retrans­mis­sions du tournoi avec France Télévisions et Eurosport ?

Non je ne parle­rais pas de contrainte, ou alors c’est une douce contrainte. En fait, on revient un petit peu au schéma imaginé. Puisque dans la diffu­sion conjointe de ces deux chaînes, on retrou­vera d’une certaine façon ce qu’on avait conçu dans l’appel d’offres. C’est à dire qu’Eurosport aura une part d’exclusivité sur le tournoi pendant que France Télévisions conser­vera l’essentiel des images sur France 2 et France 3.

Néanmoins, cet accord représente‐t‐il une véri­table déception ?

C’est d’une certaine façon une oppor­tu­nité manquée mais la prio­rité pour nous, et il ne faut pas l’oublier, était de conserver une très large diffu­sion en clair, ce qui est bien le cas dans l’accord que nous venons de mettre au point avec France Télévisions et Eurosport. C’est donc la satis­fac­tion qui l’emporte sur une rela­tive décep­tion. Une décep­tion que nous avons pu exprimer parce que au regard de la crois­sance de nos droits à l’international, on ne peut être que déçu de voir nos droits sur le sol national augmenter certes à travers ce nouveau contrat, mais de manière beau­coup moins spectaculaire.

Vous vouliez gagner beau­coup d’argent au départ avec cet appel d’offre et vous n’en gagnez pas autant que cela à l’arrivée ?

Vous savez je n’aime pas beau­coup l’expression « gagner beau­coup d’argent » parce que ce n’est pas notre objectif dans cette maison de gagner toujours plus. Mais c’est vrai qu’on avait espéré trouver une crois­sance plus impor­tante et sans doute que nous avions sous‐estimé le fait que le marché fran­çais était très diffi­cile en matière de droits de télé­vi­sion. Mais encore une fois, l’essentiel est de conserver une diffu­sion en clair pour offrir au plus grand nombre l’essentiel de Roland‐Garros.

Est‐ce que vous consi­dérez que l’appel d’offres avait été mal préparé ?

Non, je ne crois pas. Nous avions fait les choses en bonne et due forme et je ne suis pas sûr que tout le monde ait respecté la même rigueur. Le lotis­se­ment nous semblait conforme puisque que nous savons qu’aujourd’hui, il est diffi­cile pour des chaînes en clair de conserver l’intégralité des images d’un événe­ment sportif, d’où l’idée de faire entrer un autre diffu­seur dans le dispo­sitif. C’est cohé­rent. Maintenant les chiffres ne sont pas au rendez‐vous de ce qu’on avait espéré dans un premier temps.

A combien exac­te­ment se monte cet accord ?

Je ne vais entrer dans le détail des chiffres en accord avec nos parte­naires mais ce que je peux dévoiler c’est que on a conclu un accord sur 5 ans avec en cumul sur les cinq années 87,5 millions d’euros ce qui fait 17,5 millions par an, soit une augmen­ta­tion de 6% à peu près par rapport au contrat précé­dent. On est sur une légère crois­sance avec le main­tien d’une large diffu­sion en clair.

Quel est l’impact de cet accord sur le projet de moder­ni­sa­tion du stade Roland‐Garros ?

Il faut abso­lu­ment décon­necter cet accord de notre projet concer­nant le stade. En bon père de famille, nous avons établi un busi­ness plan pour la moder­ni­sa­tion du stade sur des hypo­thèses très raison­nables. Nous n’avions pas fait Perette et le pot au lait et déjà dépensé, pour notre stade, l’argent des droits de télévisions. 

Qu’est ce qui fait que les chaînes payantes comme Bein Sports et Canal+ ne se soient pas inté­res­sées plus cela aux droits de Roland‐Garros ?

Je pense que les mieux placés pour en parler ce sont elles. Je ne fais pas la stra­tégie des diffu­seurs quels qu’ils soient. Mais pour avoir beau­coup échangé avec elles, je crois que notre parti pris assumé de conserver l’essentiel de la diffu­sion en clair a sans doute dissuadé ou un peu pondéré l’enthousiasme des diffu­seurs payants. C’est vrai qu’un diffu­seur payant raisonne en fonc­tion du poten­tiel de crois­sance de son nombre d’abonnés et que cette crois­sance est diffi­cile à atteindre dès lors qu’il n’y a pas assez d’exclusivité. Encore une fois, tout est parti de notre déci­sion de conserver une large diffu­sion en clair, ce qui a sans doute, par effet de vases commu­ni­cants, dimi­nuer la valeur poten­tielle de nos droits pour un diffu­seur payant.

Un jour, allez‐vous fran­chir le pas d’une diffu­sion tota­le­ment payante ?

A priori non. Mais je ne sais pas ce que sera le marché des droits des événe­ments spor­tifs dans quelques années. C’est vrai qu’on assiste depuis pas mal de temps à une évolu­tion lourde qui consiste à un trans­fert des droits des diffu­seurs gratuits vers les diffu­seurs payants. Nous avons souhaité de ne pas aller dans ce sens là, sauf de manière margi­nale, ce qui sera le cas avec cet accord. Nous assu­mons plei­ne­ment ce choix et nous pensons que c’est le bon pour un événe­ment dont nous disons qu’il relève du patri­moine sportif de la nation. Il est logique qu’on soit attaché à cette diffu­sion en clair. Dans notre maison, l’argent est un moyen et non un but. Nous n’avons pas d’actionnaires à enri­chir ni de cours de bourse à soutenir. Notre prio­rité est l’accès du plus grand nombre au tennis et l’accès aux images d’un tournoi d’importance mondial comme Roland‐Garros. Nous sommes dans une posture logique. Après, il ne faut jamais dire jamais et je ne sais pas de quoi sera fait le paysage audio­vi­suel fran­çais dans quelques années. En tous cas pour le moment, nous sommes diffusés essen­tiel­le­ment en clair et nous en sommes ravis.