Adrian Mannarino est un être presque étrange sur le circuit. Introverti, presque trop timide dans un circuit souvent « bling bling, » le Français dénote. Il répond d’ailleurs rarement aux médias. On avait donc profité du quart de finale de Coupe Davis en avril 2018 à Gênes pour l’avoir en face à face. Au fur et à mesure de l’entretien, il ouvrait un peu la porte mais toujours avec beaucoup de discrétion. On vous a sélectionné le meilleur de cet entretien en quatre thématiques.
Théme 1 : Le narcissisme et les médias
En général, un joueur de tennis est assez narcissique. Ce n’est pas vraiment ton cas, n’est-ce pas ?
Si je joue au tennis, c’est d’abord parce que j’aime ce jeu et parce qu’il me procure du plaisir. Si je peux en donner à d’autres personnes, c’est quelque chose d’encore plus agréable, mais ma vérité se situe sur le court, nulle part ailleurs.
Est‐ce que tout ce qui se passe autour du court (les sollicitations, les médias, etc.) te pèse ?
Pas vraiment, mais je ne vais pas naturellement vers les autres. J’attends plutôt que l’on vienne vers moi. Je suis donc un peu moins sur le devant de la scène que d’autres. Maintenant, ce n’est pas quelque chose qui me dérange. Il est vrai qu’avec mon classement actuel, je suis amené à faire de plus en plus de choses en dehors du terrain. Je fais donc des efforts (rires) et ce n’est pas si désagréable que cela.
Thème 2 : Sa programmation toujours exotique
On a regardé ton calendrier, il semble que tu n’apprécies pas forcément de jouer en France…
C’est vrai que c’est rare, mais je n’ai pas une volonté farouche de ne pas jouer en France. En fait, j’essaye de construire un calendrier le plus intelligent possible. Si je vois que les conditions sur des tournois à l’étranger sont un peu meilleures et que les listes sont plus intéressantes, j’ai tendance à jouer hors de mes frontières. Ce n’est pas quelque chose qui m’ennuie de faire 4 à 5 heures de voyage plutôt qu’une heure de train. L’autre donnée importante, c’est que sur les tournois français, les joueurs que l’on retrouve sont souvent les mêmes. J’ai déjà souvent joué contre eux. J’aime bien aller voir ailleurs, c’est différent. Pour l’instant, cela ne me réussit pas si mal donc je ne vois pas pourquoi je devrais changer tout cela.
Thème 3 : Son attitude sur le court
Pour en revenir à ton attitude sur le court, on a vraiment l’impression que tu as du mal à te lâcher…
Je ne vais pas le nier. Après, j’ai un jeu qui est très tactique, je n’ai pas le physique et l’explosivité d’un Jo‐Wilfried Tsonga. Du coup, je dois compenser, je réfléchis beaucoup lors d’un match. Il faut que je sois extrêmement concentré sur ce que je fais. Il y a des joueurs plus exubérants que d’autres. Moi, je ne suis pas très expressif à la base donc cela se ressent sur le terrain assez logiquement. Être trop extraverti sur le court, cela nuirait à mon jeu, je le sais. Pour se lâcher sur les gros matchs, on a le temps, surtout une fois que l’on a remporté le duel.
Thème 4 : Le cordage
Il se dit beaucoup de choses sur la tension que tu utilises, peux‐tu rétablir la vérité ?
C’est simple, je tends aux alentours de 17–18, mais je m’adapte aussi car il y a des cordeurs qui tendent très forts. En général, suivant les conditions, je suis entre 15,5 et 18,5 max.
Ce sont des tensions relativement basses…
C’est vrai, mais c’est une tendance sur le circuit. Jack Sock, par exemple, est à 12 kg, [Mikhail] Kukushkin à 11. Avant, la moyenne se situait vers 24–25, ce n’est plus vraiment le cas.
Tu parles de régler ta tension, tu parviens vraiment à sentir la moindre différence ?
En fait, j’ai l’impression que je perds de la force d’année en année. Si ma tension est à 16,5 et que l’on me tend la raquette à 17, j’aurai l’impression que je ne passerai pas le filet (rires). À un demi‐kilo près, j’arrive à ressentir des différences énormes. Certains joueurs ne se posent pas beaucoup de questions et arrivent à changer de raquette à chaque changement de balles, ce n’est pas mon cas.
Publié le mercredi 6 mai 2020 à 14:20