Ecrasé par Roger Federer mardi (6−3 6–1), corrigé par Juan Martin Del Potro ce jeudi (6−0 6–4), Janko Tipsarevic n’a pas encore prouvé qu’il méritait sa place dans ce Masters 2012. Loin, très loin de là. Pourtant, le Serbe figure bel et bien au 9e rang mondial et fait donc partie des 8 maîtres de l’année en l’absence de Rafael Nadal. Mais ce classement est‐il réellement représentatif de son niveau ?
Chacun a certainement un avis purement subjectif sur la question. Certains valideront totalement ce statut de Top 10, arguant que Tipsarevic possède une bonne première balle de service, un jeu de fond de court solide et une vraie force de caractère. D’autres estimeront en revanche que sa réelle place se situe dans le Top 15 et guère plus haut. Pourquoi ? Parce que, selon eux, le Serbe n’a rien d’extraordinaire dans son jeu et ne possède surtout aucun coup fort, aucun réel atout dont peuvent se prévaloir tous les autres membres du Top 10.
Mais la subjectivité est, par définition, l’ennemie même de toute démonstration se voulant objective. C’est justement pourquoi l’analyse qui suit s’appuie sur des statistiques très précises. Car seuls les chiffres ne mentent pas.
Prenons d’abord les résultats du Serbe en Grand Chelem, tournois les plus importants qui permettent de se faire une vraie idée sur la valeur d’un joueur. En 2012, Tipsarevic y a été sorti deux fois au 3e tour (Open d’Australie, battu par Gasquet et Wimbledon, battu par Youzhny), une fois en huitièmes de finale (Roland Garros, battu par Almagro). Il a certes atteint les quarts de finale à l’US Open mais ceci en bénéficiant d’un tableau ultra‐favorable (un seul Top 20, à savoir Kohlschreiber, sur sa route vers les quarts). Sachant que le troisième tour d’un Grand Chelem rassemble les 32 meilleurs joueurs d’un tableau et les huitièmes de finale les 16 meilleurs, Janko Tipsarevic n’a tenu son rang de Top 10 qu’à une seule reprise en tournoi majeur cette année. C’est peu, comparé aux résultats de Tsonga, 8e mondial (un huitième, un quart, une demi, un 2e tour), Del Potro, 7e mondial (3 quarts, un huitièmes) ou même Gasquet, 10e mondial (4 huitièmes).
Penchons‐nous ensuite sur les classements des joueurs dominés par Tipsarevic cette année. En 2012, le Serbe a battu 22 membres du Top 50, 13 joueurs situés entre la 50e et la 100e place et 21 compétiteurs classés au‐delà du Top 100. Cela signifie très concrètement que 38% des victoires de Tipsarevic cette année ont été acquises contre des joueurs situés hors‐Top 100, presque autant que les 39% de victoires conquises contre des membres du Top 50. Des chiffres qui permettent tout de suite de relativiser le total de 56 victoires du Serbe cette saison.
Mais comment expliquer le « faible niveau » du tiers des joueurs battus par Tipsa’ cette année ? Sans doute par ses choix de programmation. Fin tacticien, Tipsarevic exploite au mieux le système de classement actuel. C’est pourquoi il multiplie ses participations dans des tournois de type ATP 250 afin d’y accumuler les points. Ainsi, le Serbe a joué 27 tournois cette saison, soit 6 de plus que la moyenne des autres membres du Top 10 (21). Et 6 tournois, cela représente 6 semaines de compétition supplémentaire, tout de même !
Dernier élément notoire : le ratio victoire/défaite du Serbe face au Top 20 (joueurs classés entre la 1ère et la 20e place) cette année. Il est de 15 défaites pour 7 victoires. Statistique encore plus explicite : sur les 14 matches qu’il a disputés face à des joueurs classés entre le 10e et le 20e rang – donc des compétiteurs sensés plus faibles que lui vu leur infériorité au classement – Tipsarevic en a perdu 8, soit près de 60%.
Au final, la différence de niveau ne trompe pas, une fois passée au révélateur de la confrontation face aux vrais maîtres du monde tennis. Balayé en 1h09 par Roger Federer lundi, Tipsa n’a tenu que 7 minutes de plus face à Juan Martin Del Potro ce jeudi, corrigé en deux petits sets encore, 6–0 6–4. Ne se procurant pas la moindre de balle de break, n’inscrivant que 12 points sur les 40 disputés dans la première manche, le Serbe n’a jamais fait illusion ce soir à Londres. Le public, forcément déçu, ne s’y est d’ailleurs pas trompé, manifestant clairement sa frustration dans les tribunes.
Alors certes, Janko Tipsarevic doit être épuisé. Épuisé par sa saison marathon et ses 27 tournois disputés. Le prix à payer pour faire partie du Top 10…quand on n’en a peut‐être pas réellement le niveau.
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Publié le jeudi 8 novembre 2012 à 23:20